LE MAGAZINE DES SCIENCES DE L’UNIVERS EN AFRIQUE
Les citoyens sont invités à chercher des trous noirs supermassifs !

Les citoyens sont invités à chercher des trous noirs supermassifs !

Il a été question à plusieurs reprises dans le magazine l’Astronomie de la Société Astronomique de France du radiotélescope LOFAR (Low Frequency Array). Il s’agit d’un réseau de plusieurs milliers de petits radiotélescopes répartis en Europe et coordonnés par l’institut néerlandais de radioastronomie, qui combine les signaux des différentes antennes pour créer un radiotélescope géant virtuel. La partie française de LOFAR est installée à Nançay, dans le Cher, au sein de la station de radioastronomie de l’Observatoire de Paris.

Image LOFAR d’une radiogalaxie dont l’image radio a été superposée à une image optique du ciel (issue du « Sloan Digital Sky Survey »). Les jets radio détectés par LOFAR comme ceux que l’on voit ici sous la forme de 2 lobes de part et d’autre de la galaxie indiquent la présence d’un trou noir supermassif situé au centre d’une galaxie. Il s’agit d’identifier celle-ci. Crédit Cyril Tasse, Observatoire de Paris – PSL et l’équipe survey LOFAR.

Dans le cadre du programme de science participative en ligne appelé « Galaxy Zoo » qui existe depuis une quinzaine d’années, un nouveau programme concernant les trous noirs supermassifs a été lancé sous le nom de « LOFAR Radio Galaxy Zoo ». Il s’agit pour les internautes de regarder et d’analyser des images de sources radio parmi les quatre millions de sources déjà découvertes avec LOFAR, pour aider à les associer à des galaxies vues par des télescopes observant à d’autres longueurs d’onde, par exemple dans le visible. Le but essentiel de ce travail est d’identifier les galaxies qui sont à l’origine des émissions radio (ou jets radios)  observées par LOFAR, et parfois même de reconstituer ces jets radios à partir des données obtenues automatiquement. Ces jets radios sont émis au voisinage immédiat d’un trou noir supermassif situé en général au centre d’une galaxie. Ils peuvent se propager à des millions d’années-lumière de la galaxie, que l’on appelle alors une radiogalaxie. Il reste de nombreux problèmes à résoudre concernant ces jets radios : comment sont-ils formés près du trou noir ? Quelle est la relation de ce dernier avec la galaxie qui l’abrite ? On espère que l’étude d’un grand nombre de radiogalaxies permettra de répondre à ces questions fondamentales.

Le site officiel de LOFAR galaxy zoo est:
https://www.zooniverse.org/projects/chrismrp/radio-galaxy-zoo-lofar

Fabrice Mottez, Société Astronomique de France

Brèves

Brèves

  • L’observatoire de l’Oukaimeden étudie les mondes aquatiques de l’étoile TOI-270

    Le système TOI 270 © L’Astronomie Afrique.

    En 2017, l’Observatoire de l’Oukaimeden (OUCA), de l’Université Cadi Ayyad et du
    Laboratoire de Physique des Hautes Energie et Astrophysique s’illustrait par sa participation à la découverte du système TRAPPIST-1, une étoile autour de laquelle orbitent au moins 7 exoplanètes rocheuses ! L’OUCA continue d’explorer le monde fascinant des exoplanètes et vient de publier une nouvelle étude 1 concernant les exoplanètes gazeuses de l’étoile TOI-270. Ces exoplanètes gazeuses ont toutes les caractéristiques pour être en fait des mondes aquatiques. Cette étude montre comment le future télescope spatial James Webb (JWST) pourra explorer la composition de l’atmosphère de ces planètes à partir de transits (passage des planètes entre l’observatoire et l’étoile TOI-270).

 

Chouqar, J., Benkhaldon, Z., Jabiri, A., Yaeger-Lustig, J., Soubkiou, A., Szentgyorgyi, A.  (2020) Properties of Sub-Neptune Atmospheres : TOI-270 system. Monthly Notices of the Royal Astronomical Society, Volume 495, Issue 1, pages 962–970, https://doi.org/10.1093/mnras/staa1198, https://arxiv.org/pdf/2004.12475.pdf

 

 

 

  • A la re-découverte du champ de tectites de la Côte d’Ivoire 

Tectite issue de la formation du cratère d’impact météoritique Bosumtwi au Ghana (ou Ivoirite) © David Baratoux

Les tectites sont des billes de verre issues d’un impact météoritique. Le champ de tectites en Côte d’Ivoire (Ivoirites) provient du cratère d’impact météoritique « Bosumtwi » au Ghana. Ces objets sont connus localement et portent le nom de « gardien de l’or » en Baoulé, en raison de leur association possible avec des gisements d’or superficiels. Elles ne contiennent elles-mêmes aucun métal précieux, mais sont précieuses aux yeux des scientifiques qui cherchent à comprendre leur formation, et la nature du matériau qui a été transformé sous forme de verre. Les dernières missions d’exploration datent de 1968 (John M. Saul). Une nouvelle équipe composée de chercheurs Ivoriens et Français sont  partis à leur recherche au cours de deux missions de terrain en 2019 et 2020. Les nouvelles découvertes montrent qu’il est possible de trouver de nouveaux objets qui seront étudiés par Pétanki Soro, étudiant en master à Abidjan (Université Félix Houphouët-Boigny).

David Baratoux, Directeur de recherche à l’Institut de Recherche pour le Développement

Astronomie et développement au Maroc: une expérience inédite

Astronomie et développement au Maroc: une expérience inédite

En examinant l’évolution de la production scientifique en astronomie et astrophysique au Maroc, nous constatons un timide « décollage » à partir de 1988, un développement irrégulier jusqu’en 2010, puis une nette progression depuis 2015. Nous revenons ici sur quelques faits marquants qui ont contribué à cette évolution favorable, dans un environnement encore peu propice au développement de la recherche scientifique en général et des sciences fondamentales en particulier.

La genèse

Le Maroc occupe actuellement une position relativement avancée en Afrique dans le développement de l’astronomie, tant au niveau professionnel qu’amateur.

Évolution du nombre d’articles publiés dans des revues scientifiques pour la thématique astronomie au Maroc (source NASA/ADS)

 

Vers la fin des années 80, un petit groupe d’astrophysiciens s’est formé au sein du Centre National de la Recherche Scientifique et Technique (CNRST) à Rabat, capitale du Maroc. Ces jeunes chercheurs avaient en commun le fait d’avoir tous été formé à un moment de leur parcours à l’Université Nice Sophia Antipolis et l’Observatoire de la Côte d’Azur. Ce groupe a profité d’une dynamique positive au sein de cette institution marocaine qui voulait doter le pays d’un centre dédié à la recherche à plein temps, à l’instar du Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS) en France, ou du Consejo Superior de Investigaciones Científicas (CSIC) en Espagne. Ces chercheurs ont alors créé un laboratoire d’astronomie appelé alors le « LAG » pour Laboratoire d’Astronomie et de Géophysique.

Cette période fondatrice s’est étalée sur une décennie et a notamment vu :

  • l’adhésion du Maroc à l’Union Astronomique Internationale
  • l’installation de la première expérience d’observation astronomique sur le site d’Oukaimeden (Expérience IRIS, Benkhaldoun et al., 1991 [1])
  • le démarrage de la thématique de qualification de sites astronomiques (Benkhaldoun et al., 1992 [2])
  • l’aboutissement de 3 doctorats d’états en Astrophysique.

Pour des raisons aussi bien structurelles que conjoncturelles, cette initiative s’est poursuivie et développée au sein de l’Université Cadi Ayyad à Marrakech.

La confirmation

Le Laboratoire de Physique des Hautes Energies et Astrophysique (LPHEA) a alors vu le jour au sein de la Faculté des sciences Semlalia en 1999, non sans une certaine résistance de la part des responsables du département de physique de l’époque qui souhaitaient limiter la multiplication des structures de recherche en son sein. Dix ans après, en 2009, le laboratoire s’est classé premier du département et a reçu le prix du deuxième meilleur centre de recherche de l’Université Cadi Ayyad. Entretemps, ses membres ont œuvré à la création de formations de master et de doctorat en Astrophysique, les premières du genre à l’échelle du Maroc et de la région nord-africaine hors Égypte. Le laboratoire a également accompagné le développement de l’Observatoire Astronomique de l’Oukaimeden, dans le haut Atlas Marocain, amenant les instances de l’Université à l’adopter comme centre de recherche en 2009, après l’inauguration de ses locaux en 2007.

La voie lactée au dessus de l’observatoire astronomique de l’Oukaïmeden. © Ali Astro/Astronomie Marrakech

Le décollage

La décennie suivante (2010-2020) est une période de consécration de l’Observatoire  d’Oukaïmeden, comme l’une des plus importantes infrastructures de recherche en astrophysique en Afrique, en particulier avec l’installation de pas moins de 5 coupoles et plusieurs instruments en relation avec les thématiques de recherche suivantes :

  • Planétologie et petits corps du système solaire : Télescopes MOSS, TRAPPIST-Nord et OWL (Optical Wide-field patroL- Network) en plus de caméras de détection de météorites
  • Exoplanètes : Télescopes Meade-16, TRAPPIST-Nord et OWL (Optical Wide-field patroL- Network)
  • Etoiles variables : Spectographe Herschel sur Télescope Meade-16
  • Météorologie de l’Espace : Expérience RENOIR (activité solaire sur l’environnement planétaire) et station GPS
  • Science de l’Espace : Antenne du projet SWORM.

Ces réalisations sont le fruit d’une coopération internationale très diversifiée avec les institutions de recherche suivantes :

  • l’Université Nice-Sophia Antipolis et l’Observatoire de la Côte d’Azur (France)
  • l’Observatoire de Paris (France)
  • l’Université Paul Sabatier (Toulouse, France)
  • l’Institut de Recherche pour le Développement (IRD, France)
  • l’Université de Liège et l’Université d’Antwerp (Belgique)
  • l’Université de l’Illinois (USA)
  • la Korean Astronomy and Space Institute (KASI) (Corée du Sud)
  • l’Université King Abdulaziz (Arabie Saoudite)
  • le Centre Nationale des Études Spatiales (CNES, France)

D’autres organismes associatifs et personnes physiques ont contribué à la genèse de l’Observatoire et à son rayonnement. Parmi les principaux contributeurs, citons :

  • l’Uranoscope de l’Ile-de-France
  • l’Ambassade de France au Maroc
  • la Société Jurassienne d’Astronomie en Suisse
  • les Forces Armées Royales Marocaines
  • la Société Atlas Golf Marrakech
  • l’Association d’Astronomie Amateur de Marrakech (3AM)
  • les Astronomes Claudine Rinner et Michel Ory.

Les réalisations et avancées scientifiques

Les travaux scientifiques sont maintenant très diversifiés au Maroc, avec une expertise reconnue dans plusieurs domaines de l’astrophysique. Le LPHEA mène des travaux de pointe dans les thématiques suivantes:

  • Étude et qualification des sites astronomiques

En quelques années, le laboratoire a acquis une expertise dans l’étude et la qualification des sites d’observation astronomique. Cet axe s’est poursuivi aussi bien du point de vue théorique qu’expérimental, avec la modélisation des différents paramètres optiques sur la dégradation de l’observation à travers l’atmosphère terrestre et la mise en œuvre de plusieurs instruments d’observation de la qualité du ciel.

  • Exoplanètes

Le centre de recherche marocain s’est doté de compétences dans l’observation d’exoplanètes, en utilisant les techniques de pointe : les vitesses radiales, l’imagerie directe et surtout les transits. Le méthode de transit consiste à observer les variations lumineuses de l’étoile provoquées par le passage d’une planète devant celle-ci (à l’instar d’une éclipse). L’amplitude de la diminution de l’intensité de la lumière dépend des tailles de l’étoile et de la planète. La durée du transit est liée à la distance de la planète à l’étoile et de la masse de l’étoile. Il est donc possible d’estimer la taille et la distance de la planète à partir de la seule observation des rayonnements émis par une étoile et de la diminution de ceux-ci lors du transit. De plus, en observant les transits (transit secondaire) avec des instruments très précis, il est également possible de détecter certains éléments présents dans l’atmosphère des planètes. Grâce à l’instrumentation de l’observatoire de l’Oukaimeden, le laboratoire a pu effectuer plusieurs campagnes d’observation qui ont permis de valider la méthode. Ce projet a permis en particulier de participer à la découverte du fameux système TRAPPIST-1 constitué de 7 planètes rocheuses de type terre dont trois sont situé dans la zone habitable de la planète hôte (Gillon et al. 2017 [3]).

  •  Haute résolution angulaire, Interférométrie

Le LPHEA possède une riche expérience dans ce domaine, qui a pour but d’obtenir des instruments astronomiques ayant la meilleure résolution possible, afin d’observer des détails fins sur les objets astronomiques observés.

  • Physique Solaire

Le Soleil est la source du vent solaire, un flux de gaz qui atteint la Terre à une vitesse de plus de 500 km par seconde. Les perturbations dans le vent solaire secouent le champ magnétique de la Terre, introduisent des particules accélérées et de l’énergie dans la ceinture de radiation de la Terre. La Météorologie de l’espace étudié les effets de l’activité solaire sur l’atmosphère de la terre. Car en plus d’avoir une influence sur le climat de la terre, ce rayonnement en excès peut endommager les satellites et constitue une menace pour les astronautes. Secouer le champ magnétique terrestre peut aussi provoquer des pointes de courant dans les lignes électriques qui ont pour effet d’endommager les réseaux électriques à large échelle causant des dommages économiques importants.

  •  Planétologie et petits corps du système solaire

Le laboratoire s’est spécialisé également dans la détection des flashs lunaires. Ces travaux s’inscrivent dans le contexte international de préparation des missions sismologiques lunaires qui utiliseront les impacts comme source sismique. Cet axe a connu un certain succès avec la détection de plusieurs flashs d’impact par l’équipe marocaine et un article a été publié suite à ces découvertes. Un doctorat a été soutenue en Septembre 2016 (Mamoun Ait Moulay Larbi [4]) et ce thème est en train de s’étendre à l’Observation des flash de Jupiter avec l’implication d’une doctorante de l’Université de Dakar.

Le centre de recherche travaille aussi sur la détection et le suivi des météorites. Un projet de collaboration avec une équipe de l’Observatoire de Paris a permis d’installer deux caméras de détection de météores sur les deux observatoires de Marrakech et d’Oukaimeden. Ce réseau est en phase de s’étendre, grâce notamment à l’appui du réseau français FRIPON et d’une équipe australienne en contact avec Hasnaa Chenaoui de l’université de Casablanca (Réseau MOFID). Un doctorat a été soutenu dans cette thématique et deux autres sont en cours.

L’organisme marocain participe également à la détection et au suivi des petits corps du Système Solaire. Ces travaux ont notamment permis la découverte de quatre nouvelles comètes, de trois géocroiseurs ainsi que plusieurs nouveaux astéroïdes par le télescope MOOS. Cette thématique est aussi appelée à se développer de façon conséquente grâce à la récente coopération avec l’Agence Spatiale Coréenne qui vient de procéder à l’installation d’un télescope robotisé de 50cm de diamètre sur le site d’Oukaimeden. En plus des petits corps du système solaire, cet instrument est appelé à traquer les débris des satellites. L’équipe de recherche marocaine est appelée à intégrer ce programme de recherche.

  •  Spectroscopie des étoiles variables

Grâce au développement de l’Observatoire d’Oukaimeden, les chercheurs du LPHEA peuvent utiliser deux télescopes C14 et T500 fonctionnant totalement en mode contrôle à distance. Ces instruments permettent d’obtenir des mesures photométriques et spectroscopiques d’étoiles variables comme les étoiles pulsantes de type  RR Lyrae. La variation de l’amplitude de pulsation de ces étoiles, découverte en 1906, mais toujours inexpliquée à ce jour, pourrait dévoiler ses mystères grâces à des observations à Oukaimeden. D’autres types d’étoiles variables sont également à l’étude depuis ce site.

  • Réserve du ciel étoilé

Depuis 2018, le laboratoire s’est engagé dans un projet de création d’une réserve de ciel étoilé (Atlas Dark Sky Reserve), autour de l’Observatoire d’Oukaimeden. Le but premier de ce projet est la conservation de la qualité du ciel à Oukaïmeden, un des meilleures sites d’observation astronomique de la planète avec plusieurs télescopes de classe internationale. L’équipe compte en outre, protéger et prospecter d’autres sites de la réserve pour l’installation d’un grand télescope marocain ou étranger. La réserve servira de laboratoire naturel à l’université Cadi Ayyad et ses laboratoires de recherche pour l’observation et l’expérimentation de nouvelles technologies, ayant un impact favorable sur la consommation énergétique liée à éclairage public. Ce champ de recherche ouvrira des perspectives en terme d’éclairage rationnel et impulsera ainsi la recherche, le développement et l’innovation dans ce domaine, entrainant un impact positif pour le Maroc et son rayonnement international.

Zouhair Benkhaldoun, Directeur de l’Observatoire de l’Oukaïmeden

 

[1] Benkhaldoun, Z., Kadiri, S., Lazrek, M., and Touma, H., “Moroccan Participation in the Study of Solar Oscillations”, Solar Physics, vol. 133, no. 1. pp. 61–64, 1991. doi: 10.1007/BF00149824.

[2]  Benkhaldoun, Z., Kadiri, S., Lazrek, M., and Vernin, J., “A simple flux integration photometer for day time site testing at Oukaimeden”, Experimental Astronomy, vol. 2, no. 6. pp. 345–356, 1992. doi: 10.1007/BF00395985.

[3] ]Gillon, M., “Seven temperate terrestrial planets around the nearby ultracool dwarf star TRAPPIST-1”, Nature, vol. 542, no. 7642. pp. 456–460, 2017. doi: 10.1038/nature21360.

[4] Ait Moulay Larbi, M., “First Lunar Flashes Observed from Morocco (ILIAD Network): Implications for Lunar Seismology”, <i>Earth Moon and Planets</i>, vol. 115, no. 1–4. pp. 1–21, 2015. doi: 10.1007/s11038-015-9462-1.

Photo des Lecteurs

Photo des Lecteurs

Merci aux lecteurs qui nous ont envoyé des photos depuis les quatre coins de l’Afrique, du Maroc à Madagascar, en passant par le Bénin, le Sénégal, le Togo, le Cameroun, l’Algérie, le Gabon et le Congo.

Le choix a été difficile, mais voici ici une sélection de ces plus belles photos:

Félicitations à Serge Ebeza pour ce beau moment d’évasion grâce à cette photo prise au Gabon. Serge gagne une superbe lunette Bresser Messier de Sterren Schitteren Voor ledereen.

Le vainqueur de la lunette Bresser Messier de Sterren Schitteren Voor ledereen nous vient du Gabon! Serge Ebeza vit au Gabon et est passionné par l’astronomie et sa vulgarisation. Il souhaite monter le premier observatoire au Gabon. Avec ce cliché, il nous invite au voyage en Afrique centrale, et plus exactement au Gabon. Cette photo de la voie lactée a été prise à Nkoghe Doum sur une plage éphémère au bord du fleuve Ogooué. Félicitations au vainqueur du concours, en espérant que cette lunette créera des vocations pour l’astronomie et les sciences au Gabon! Félicitations Serge!

 

La voie lactée observée par le jeune Abdessamad Taoufiq (19 ans), depuis Chtouka Ait Baha au Maroc.

La passion pour l’astronomie commence dès le plus jeune âge, comme on peut le voir avec cette jeune fille de 3 ans au Cameroun, devant une lunette astronomique Bresser Messier de Sterren Schitteren Voor ledereen.

Les rémanents d’une supernova, les dentelles du Cygne, observées par Djalil Ichiri, depuis Bouismail, une petite ville du littoral algérien, à 40km d’Alger.

Cynthia Ambinintsoa nous partage sa belle vision du ciel étoilé au dessus de Ivato, près d’Antanananrivo à Madagascar.

Meriem Bendahman, partage avec nous cette vue magnifique de la lune, depuis sa terrasse à Nador, au Maroc. Meriem est en première année de doctorat en astroparticules, nous lui souhaitons une excellente continuation et de devenir astrophysicienne.

Camille Flammarion

Camille Flammarion

Sa vision du système solaire

 

Afin de célébrer le 90e anniversaire de sa mort, nous pouvons comparer les « prévisions » de Camille Flammarion et la réalité du Système solaire, tel qu’il nous est révélé par les différentes missions spatiales lancées depuis la fin du xxe siècle.

 

Camille Flammarion, né en 1842 et décédé le 3 juin 1925, aura été un vulgarisateur hors pair. Astronome passionné et passionnant, boulimique de savoir et doué d’un véritable talent littéraire, il mettra pour la première fois la lecture d’ouvrages d’astronomie à la portée du grand public, avec l’aide de son frère, le non moins célèbre éditeur Ernest Flammarion. C’est encore maintenant un vrai bonheur de se replonger dans la lecture des ouvrages majeurs comme l’Astronomie populaire ou bien Les Terres du ciel, ou encore dans les articles des premiers numéros de la revue L’Astronomie créée justement à l’initiative de Camille Flammarion. Lire l’Astronomie populaire, c’est redécouvrir l’étendue déjà incroyable des connaissances de l’époque, mais aussi mesurer l’immense bond en avant que l’Homme a accompli en à peine plus d’un siècle dans la connaissance des mondes qui nous entourent. 

La Terre et la Lune

Dans Les Terres du ciel, un ouvrage de 800 pages paru pour la première fois en 1877 puis réédité en 1884, Camille Flammarion dresse un bilan exhaustif des connaissances de l’époque sur les planètes du Système solaire et de leurs conditions d’habitabilité. Il est en effet convaincu que la vie foisonne dans l’Univers. Il n’y a, nous dit-il, qu’à regarder le contenu d’une goutte d’eau au microscope pour s’en convaincre (figure 1)… Après un rappel historique sur les observations de chaque planète et chaque satellite, Flammarion expose les conditions physiques régnant à leur surface, pour ensuite imaginer à quoi peut ressembler la vie sur ces autres « Terres ». 

De nombreuses gravures viennent agrémenter la lecture de ses ouvrages souvent volumineux. Que savions-nous de l’apparence globale de la Terre en 1884, à une époque où les aventuriers les plus intrépides (dont Flammarion lui-même) n’avaient guère pu dépasser quelques milliers de mètres d’altitude, en montant au péril de leur vie dans des ballons ? Seules des observations parcellaires, doublées de considérations physiques, permettaient de le dire… Il est alors bien surprenant de voir à quel point la Terre, photographiée pour la première fois dans son ensemble par les astronautes de la mission Apollo, ressemble effectivement à la gravure de la Terre reproduite par Camille Flammarion dans Les Terres du ciel (figure 2)…    

Au chapitre des Terres du ciel consacré à la Lune, on trouve une gravure montrant encore une fois la Terre, mais cette fois telle que des habitants « sélénites » pourraient la voir depuis le sol (figure 3). « On admire de la Lune un astre majestueux, que l’on ne voit pas de la Terre, dont le caractère spécial est de rester immobile dans le ciel, tandis que tous les autres passent derrière lui, et d’offrir les dimensions les plus grandioses. Cet astre, c’est notre propre Terre, près de quatre fois plus large en diamètre que la Lune, treize fois et demie plus étendue en surface et plus lumineuse, et qui offre à la Lune des phases correspondantes à celles que la Lune nous présente, mais en sens inverse ».  Il rajoute : « Monde mort en apparence, mais beau, silencieux, mais éloquent ; froid, mais lumineux… » Cette phrase prémonitoire fait écho aux premiers mots d’Armstrong et Aldrin, découvrant depuis le hublot de leur module lunaire au beau milieu de la mer de la Tranquillité ce qu’ils appelleront une « magnifique désolation ».

La planète Mars et ses satellites

Si certaines hypothèses peuvent maintenant nous paraître complètement obsolètes, comme la présence possible d’une vie intelligente sur Mars à l’origine d’un immense système de canaux d’irrigation (figure 4), il est frappant de voir la pertinence de certaines de ces gravures anciennes, qui résonnent comme un lointain écho aux fabuleuses images que nous rapportent nos missions spatiales actuelles.

La planète Mars revêt une importance toute particulière dans la vie et dans l’œuvre de Flammarion. Il lui consacrera 210 pages des Terres du ciel, puis les deux volumineux tomes La Planète Mars et ses conditions d’habitabilité, parus en 1892 et 1909. Quelle ne serait pas son excitation s’il pouvait participer avec nous à l’extraordinaire aventure des sondes en orbite et des rovers tels que Curiosity arpentant la surface de Mars !  Comme dans le cas de la Lune, Flammarion imagine : « Quel est l’aspect de l’Univers, vu de cette station voisine ? Les habitants de Mars n’habitent pas plus le ciel que nous, et nous l’habitons comme eux, ni plus ni moins. Comment voient-ils la Terre ? […] Les astronomes de cette planète peuvent observer la Terre parmi les constellations, comme nous observons Vénus. Ainsi, par exemple, les revues astronomiques de Mars ayant à annoncer à leurs lecteurs le mouvement de la planète Terre dans le ciel pendant l’année 1884, auront publié la figure précédente [fig. 5], que nous avons pu du reste calculer nous-même sans aller sur Mars. »

L’image de la Terre sur cette figure (fig. 5), qui montre la précision des prédictions astronomiques effectuées par Flammarion, la sonde américaine Mars Reconnaissance Orbiter l’a réalisée ! Belle confirmation de la prédiction…

Si la Terre apparaît au télescope comme un croissant dans le ciel, « vue de Mars, dès le coucher du Soleil, la Terre brille dans le ciel comme une étoile… ». Là encore, nos sondes spatiales actuelles, Spirit, Opportunity, puis Curiosity, vont immortaliser cette magnifique vue de la Terre dans le ciel de Mars. Curiosity parviendra même à distinguer la Lune, dans son cliché pris par la caméra Mastcam le 31 janvier 2014, alors que la Terre est située à 160 millions de kilomètres de Mars (fig. 6). La gravure de Flammarion représente une rivière au premier plan. Curiosity lui, ne verra qu’un désert aride, mais un désert qui a gardé les traces géologiques indiquant la présence dans un lointain passé de lacs alimentés par des rivières.

La figure 7 montre une autre comparaison entre une gravure des Terres du ciel et la photographie d’un coucher de Soleil prise par le rover Spirit le 10 février 2005.

Quels sont les phénomènes astronomiques que les astronomes de Mars peuvent observer ? Suite à la découverte des satellites de Mars Phobos et Deimos en 1877 par l’astronome Asaph Hall, Camille Flammarion imagine dans ses Terres du ciel à quoi peut ressembler une éclipse de Soleil sur Mars. Les calculs des tailles respectives (~6000 km pour Deimos et ~2000 km pour Phobos) et des distances à la planète sont remarquablement proches des vraies valeurs. Il nous dit : « Quelquefois on peut voir ces deux lunes, arrivant des deux parties opposées du ciel, s’avancer l’une vers l’autre, se rencontrer et s’éclipser partiellement ou totalement. D’où il résulte qu’indépendamment des éclipses de lune produites par le passage des satellites dans l’ombre de la planète, éclipses analogues à celles qui se présentent sur notre monde, il y a sur Mars des éclipses inconnues à la Terre : celles d’un satellite par l’autre, celles du second satellite par le premier. […] Ainsi Phobos peut éclipser totalement Deimos, et cela très facilement. Mais il ne peut jamais éclipser totalement le Soleil de Mars, dont le diamètre moyen est de 21 minutes. Lorsque la combinaison des mouvements célestes l’amène devant l’astre du jour, il peut se produire une éclipse annulaire du genre de celle qui est représentée ici [figure 8], à laquelle peut s’ajouter le passage du second satellite devant le Soleil, sous la forme d’un petit disque noir. »

Camille Flammarion aborde régulièrement les questions de société dans ses ouvrages, et n’hésite pas à s’enflammer : « Lorsque l’on songe aux progrès réalisés dans notre seul xixe siècle, chemin de fer, télégraphes, applications de l’électricité, photographie, téléphone, etc., on se demande quel serait notre éblouissement si nous pouvions voir d’ici les progrès matériels et sociaux que le vingtième, le vingt et unième siècle et leurs successeurs réservent à l’humanité de l’avenir. L’esprit le moins optimiste prévoit le jour où la navigation aérienne sera le mode ordinaire de circulation ; où les prétendues frontières des peuples seront effacées pour toujours ; où l’hydre infâme de la guerre et l’inqualifiable folie des armées permanentes seront anéanties devant l’essor glorieux de l’humanité pensante dans la lumière et dans la liberté ! » Eh bien, il nous reste encore un peu de chemin pour y parvenir… Puisse-t-il avoir un jour raison !

 

Légendes :

  1. La population d’une goutte d’eau représente tout un monde (Camille Flammartion,  Les Terres du ciel).
  2. À gauche : la « pleine Terre » vue de la Lune, d’après Flammarion. À droite : première photographie globale de la Terre, prise par les astronautes d’Apollo 17.
  3. ci-dessus : Phases de la Terre vue de la Lune, d’après Flammarion. à gauche : Lever de Terre photographié par la caméra HD de la sonde japonaise Kaguya en 2008.
  4. Les canaux de Mars.
  5. à gauche  : aspect de la Terre vue de Mars (juin 1884). à droite, le couple Terre-Lune photographié depuis l’orbite martienne par l’instrument HiRISE de la sonde Mars Reconnaissance Orbiter.
  6. ci-dessus  : Gravure des Terres du ciel : « Vue de Mars, dès le coucher du Soleil, la Terre brille dans le ciel comme une étoile… » Ci-dessous : La Terre, photographiée par le rover Curiosity dans le ciel de Mars, apparaît comme un point, double…
  7. à gauche : Le Soleil de minuit sur la planète Mars. à droite : Coucher de Soleil photographié par le rover Spirit. (NASA/JPL/Texas A&M/Cornell)
  8. ci-dessus : Une éclipse de Soleil par les deux lunes de Mars imaginée par Flammarion. en dessous : Une éclipse de Soleil par Phobos, observée par le rover Spirit le 10 février 2005. (NASA/JPL/Cornell)
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