LE MAGAZINE DES SCIENCES DE L’UNIVERS EN AFRIQUE
Le Maroc, lauréate du challenge international Younivers

Le Maroc, lauréate du challenge international Younivers

Entre mars et décembre 2024, 90 jeunes d’Albanie, Algérie, Belgique, France, Madagascar, Maroc, Sénégal et Tunisie de 11 à 18 ans, ont réalisé une cinquantaine de vidéos astronomiques. La finale internationale s’est déroulée en visio le 10 janvier 2025. Tous les lauréats de chaque pays ont gagné une lunette astronomique offerte par SSVI.  La lauréate du challenge de la francophonie est Sofia Zerktouni (Maroc) et a gagné une météorite lunaire offerte par Luc Labenne.

Découvrez tous les lauréats sur la chaine Younivers.

Sofia Zerktouni (Maroc) a répondu à la question « Comment décollent les fusées »

 

Félicitons également aux lauréats malgaches RAFANOMEZANTSOA Julie (12 ans)- RANDRIAMIANDRISOA Nampoina (13 ans)- RAZAFIMANDIMBY Ravoniaina (14 ans) qui ont répondu à la question « Comment distinguer les étoiles des planètes »

 

Bravo aux lauréates Sénégalaises Kadiata Deh et Mariama Ndiaye qui ont répondu à la question « Comment fonctionne un nanosatellite »

Bravo à la lauréat tunisienne Nesrine Abdelhedi qui a répondu à la question « Comment se forment les marées? »

 

Et felicitations également à le lauréat algérien Mohamed Anis Benzehra qui a répondu à la question Comment les exoplanètes pourraient-elles être habitables ? » »

 

 

Planétarium: histoire d’une machine à montrer les étoiles

Planétarium: histoire d’une machine à montrer les étoiles

Chaque année en France, plus d’un million de visiteurs prennent place sous la coupole d’un planétarium. Depuis les années 2000, les planétariums sont devenus de véritables centres culturels, proposant des conférences, des spectacles immersifs et des programmes éducatifs pour tous les âges. Ils jouent un rôle crucial dans la sensibilisation du public aux questions de l’astronomie, de l’astrophysique et de l’exploration spatiale. Leur nombre ne cesse de croître et l’offre culturelle qu’ils proposent permet de satisfaire les attentes de tous les publics.

Planétaire Zeiss Starmaster utilisé au Palais de la découverte de 1997 à 2019. (© S. Fontaine)

 

Un planétarium sert à reproduire l’aspect de la voûte céleste et les mouvements observables dans le ciel au cours du temps (phases de la Lune, mouvements des planètes le long de l’écliptique, etc.). Traditionnellement, il s’agit d’un dispositif comprenant un système optique de projection d’étoiles et de planètes appelé planétaire et une coupole servant de surface de projection. De nos jours, les systèmes de projection numérique permettent la diffusion de vidéos sur toute la surface du dôme, offrant une immersion totale parmi les étoiles de la Galaxie et rendant possible la visite d’astres lointains.

Les origines

Le mot planétarium est très ancien : dans l’Antiquité, il désignait une maquette représentant le Système solaire et les mouvements des astres mobiles (Soleil, Lune et planètes).À la fin du XVIIe siècle apparaissent les modèles héliocentriques, comme celui de Christiaan Huygens construit en 1682. Mais à cette époque, les planétariums ne ressemblaient pas du tout à ceux que l’on connaît aujourd’hui ; ils ne représentaient pas les étoiles !

C’est en 1664 qu’apparaît le véritable ancêtre du planétarium tel qu’on se l’imagine aujourd’hui : le Globe de Gottorp, construit par le duc Frédéric III de Holstein-Gottorp au sein de son château situé dans le nord du Schleswig-Holstein, en Allemagne. Mesurant environ 3 mètres de diamètre, le Globe de Gottorp représentait la sphère terrestre sur sa face extérieure et abritait un planétarium dans son intérieur. Les étoiles, l’écliptique et les figures mythologiques des constellations étaient peints sur la paroi. Le globe était monté sur un axe qui permettait sa rotation afin de simuler le mouvement diurne et une dizaine de spectateurs pouvaient y prendre place pour admirer le ciel « tourner tout autour de soi»!

 

Reconstitution du Globe de Gottorp. (©Stiftung Schleswig-Holsteinische Landesmuseen)

 

En 1923, le premier planétarium projette ses étoiles sous la coupole installée sur le toit de l’usine Zeiss, à Iéna, Allemagne. (© Zeiss archive)

 

Voir et comprendre le ciel grâce à des ampoules

En 1919,Walther Bauersfeld, directeur de la société allemande Carl Zeiss, imagine le concept de planétarium moderne. Il confie la réalisation technique du projet à Max Wolf (directeur de l’observatoire de Heildelberg) et à Oskar von Miller (ingénieur et cofondateur du Deutsches Museum de Munich). Le prototype fut présenté en 1923, au siège de la société Zeiss, à Iéna (Allemagne). Le concept est celui employé encore aujourd’hui : « un ciel artificiel éclairé de l’intérieur par un projecteur central ». Pour ce faire, la lumière d’une lampe traverse les trous percés dans des plaques métalliques et se projette sur une coupole. Chaque trou correspond à la position d’une étoile. D’autres appareils motorisés permettent de projeter et de déplacer l’image des planètes, de la Lune et du Soleil le long de l’écliptique. Le tout offrant une simulation du ciel étoilé assez réaliste et dont certains mouvements sont fidèlement reproduits. Outre la présentation des constellations, le conférencier peut donc montrer et expliquer le mouvement diurne, les éclipses, les rétrogradations planétaires, etc.Tous ces mouvements célestes sont présentés « vus depuis la Terre » : les explications doivent donc être données en se référant au système géocentrique, ce qui exige un grand talent de vulgarisation de la part des conférenciers « planétaristes » pour expliquer des notions parfois complexes. Pendant longtemps, la présentation du phénomène des saisons a même servi de test pour le recrutement des nouveaux planétaristes.

En 1925, le premier planétarium fut installé au Deutsches Museum de Munich. Le succès fut immédiat et le concept se répandit rapidement dans le monde entier, en particulier aux États-Unis et en Europe. Des villes comme Chicago (en 1930), NewYork (en 1935) et Paris (en 1937) érigèrent des planétariums qui attirèrent rapidement tous les amateurs de sciences et de technologies ; sans oublier les visiteurs un peu rêveurs, et même romantiques, simplement venus revoir les étoiles disparues depuis déjà longtemps du ciel des grandes villes. Dès le début, les planétariums ont aussi été utilisés pour présenter des spectacles, notamment musicaux. Aujourd’hui encore, de nombreux concerts sont donnés sous les étoiles, pour le plus grand bonheur des astronomes et des mélomanes.

En seulement quelques années de perfectionnement, le planétarium est devenu un outil pédagogique puissant permettant de simuler des phénomènes astronomiques passés, présents et à venir visibles depuis n’importe quel point de la surface terrestre. L’excellente qualité des lentilles développées par la société Zeiss a permis une projection fidèle du ciel et une grande attention a été portée au respect des magnitudes et aux couleurs des étoiles. De nos jours, les planétaires opto-mécaniques, projecteurs qui mêlent mécanique pour rendre compte des mouvements des astres et système optique, projettent environ 9 000 étoiles (pour les deux hémisphères célestes).

Rapidement, de nombreux concurrents de la société Zeiss ont fait leur apparition, comme Spitz, aux États-Unis, à partir de 1947, et GoTo, au Japon, en 1959. Jusque dans les années 2000, la firme allemande est restée le leader mondial incontesté et bénéficie, aujourd’hui encore, d’une notoriété sans égale.

 

Des systèmes en évolution

Progressivement, le nombre de projecteurs annexes intégrés aux nouveaux planétariums a augmenté.Ainsi ont été proposés au catalogue des constructeurs : des projecteurs optionnels de repères astronomiques (équateur céleste, écliptique, cercle de précession, cercles horaire et vertical mobiles, pôles célestes, méridien, etc.), des simulateurs d’éclipses de Lune et de Soleil, des projecteurs de pluies d’étoiles filantes,les figures mythologiques des constellations, etc.

Au milieu des années 1970, le concept de « laserium » fut installé au Griffith Observatory & Planetarium de Los Angeles (Californie, É.-U.). Des effets spéciaux à base de lasers et des images mouvantes, souvent psychédéliques, étaient projetés sur la coupole du planétarium.Aucun commentaire scientifique n’accompagnait cette programmation proposée en fin de journée. Seule de la musique était diffusée grâce à un système audio multicanal qui plaçait le spectateur au centre d’une expérience sensorielle unique. Ce concept a été rapidement présenté dans d’autres planétariums.

Dans les années 1980, afin d’enrichir les présentations, la plupart des planétariums ont été dotés de projecteurs de diapositives. Dans certaines salles, la projection pouvait même se faire sur l’intégralité de la surface de la coupole ! Certes, l’immersion est fantastique, mais le coût d’installation est exorbitant et la maintenance est un défi de chaque instant pour les techniciens (qui sont, parfois, aussi les conférenciers). Certaines coupoles de plus de 20 mètres de diamètre, comme à la Cité des sciences et de l’industrie (Paris), disposaient d’au moins 120 projecteurs afin de diffuser des images « pleine voûte ».

 

Griffith Observatory & Planetarium sur les hauteurs de Los Angeles. La grande coupole centrale abrite le planétarium tandis que lunette et télescope se trouvent sous les deux plus petites. (© Matthew Field)

Des avancées technologiques au service de la médiation scientifique

À la fin des années 1980, l’idée de remplacer les planétaires opto-mécaniques et les projecteurs de diapositives par des vidéoprojecteurs excite les esprits des montreurs d’étoiles et des constructeurs de planétariums. Le concept a de quoi séduire : une fois le logiciel dédié à la présentation du ciel développé, il ne resterait plus qu’à projeter sur le dôme la modélisation de la voûte céleste pour s’envoler vers les étoiles.

Les premières installations de ce type furent présentées au début des années 1990. Mais pour de nombreux utilisateurs exigeants, la technologie de projection n’était pas encore au point : les images étaient peu lumineuses et la définition médiocre. Surtout, le ciel étoilé était bien fade comparé à celui des vénérables systèmes opto-mécaniques qui projettent des étoiles éclatantes et ponctuelles qu’aucune autre technologie n’égale encore.

Lorsque des vidéoprojecteurs plus performants furent commercialisés et que les systèmes informatiques permirent de calculer en temps réel les lourdes images animées, la promesse fut tenue. Mais il restait encore à élaborer des techniques simples et fiables pour disposer et calibrer les vidéoprojecteurs. En effet, selon le diamètre de la coupole, le type de matériel utilisé et la résolution souhaitée, il convient souvent d’installer une dizaine de vidéoprojecteurs sous la coupole ! Des problèmes d’alignement, de recouvrement des images, de géométrie et d’harmonisation de la colorimétrie et de la luminosité se posent rapidement, surtout dans le cas d’une projection sur une surface sphérique. Conserver une qualité de projection optimale se révèle être un épouvantable cassetête pour les équipes techniques…

C’est à partir de 2010, que les projecteurs opto-mécaniques traditionnels furent peu à peu remplacés ou complétés par des systèmes numériques capables de produire des images haute résolution (une résolution de 8K est courante en 2024). Des logiciels sophistiqués permettent désormais de visualiser des données astronomiques en temps réel (positions des exoplanètes, catalogues de galaxies, positions des satellites artificiels, etc.), de présenter des phénomènes astronomiques (éclipses, transits planétaires, précession des équinoxes, etc.), d’explorer des surfaces planétaires, d’approcher des galaxies lointaines, de traverser des nébuleuses, etc. Grâce aux systèmes numériques, les présentations ne se limitent plus à l’observation du ciel vu depuis laTerre.Au pied levé, l’animateur peut désormais « emmener » le public en voyage dans le Système solaire, puis assister à la formation d’étoiles nouvelles avant de sortir de laVoie lactée…

 

Planétarium hybride où l’usage conjoint d’un planétaire opto-mécanique d’un sytème numérique de projecction pleine voute permet tous les types de présentations possibles. (© Zeiss Planetarium Bochum)

 

Depuis l’an 2000, le nombre de planétariums a doublé dans le monde, passant d’environ 1 500 à 3 000. Certaines salles proposent d’autres thèmes que ceux dédiés au ciel et à l’espace : dinosaures, volcans, exploration des fonds marins, visite des pyramides d’Égypte, etc. Pour certains établissements, c’est cette offre multiple qui rend économiquement viable la construction d’un « planétarium ». De surcroît, les systèmes numériques sont prévus pour être totalement automatisés. De nos jours, nul besoin d’astronome pour faire tourner un planétarium !

 

 

Les nouveaux systèmes de projection soulèvent la question de la disposition des fauteuils installés sous la coupole. Avec la possibilité de diffuser des séquences vidéo, voire des films complets, la disposition concentrique des sièges, c’est-à-dire répartis autour du planétaire placé au centre de la salle, peut laisser place à une installation orientée où chaque spectateur portera le regard dans la même direction, à l’instar des salles de cinéma. Certes, le public gagne en confort, mais la capacité d’accueil du planétarium est alors réduite d’au moins 30 % par rapport à une installation concentrique.

Une salle dite « orientée » offre aussi la possibilité de placer une scène située face au public. Un choix qui peut se révéler très judicieux, surtout si la salle est inclinée, pour présenter des spectacles et des conférences. C’est ce type de planétarium, très polyvalent, qui équipe désormais de nombreux musées.

Plusieurs décennies durant, le public qui assistait à une séance de planétarium écoutait le conférencier ; ce dernier, muni « d’une flèche lumineuse » pour montrer les étoiles, commentait le ciel étoilé tout en pilotant le planétaire afin de simuler les mouvements des astres. De nos jours, beaucoup de planétariums proposent, avec succès, des présentations mixtes : une partie de séance enregistrée et une partie assurée en direct par un animateur. D’autres planétariums, de plus en plus rares, ont réussi à conserver l’intégralité de leurs présentations en direct. Ce qui permet d’adapter le discours en fonction du public présent, de coller à l’actualité astronomique et de créer une agréable complicité entre l’animateur et l’auditoire durant la présentation qui dure généralement une heure. Une philosophie de présentation appréciable mais exigeante puisqu’elle nécessite la mise en place d’une équipe de plusieurs conférenciers formés à l’astronomie et à sa vulgarisation dans un planétarium.

En 2021, les « dômes LED » ont fait leur apparition. Ici, pas de projecteur : toute la surface de la coupole est recouverte de LED et elle devient ainsi un gigantesque écran de télévision. La technologie est onéreuse et le rendu n’est pas encore optimal : la diffusion est trop lumineuse pour un usage astronomique et la définition est à la traîne.À l’origine, cette technologie a été développée pour équiper des panneaux publicitaires installés en extérieur et visibles de nuit comme de jour. De plus, la consommation électrique est importante et les LED chauffent considérablement, ce qui exige un système de climatisation performant afin de préserver les matériels et garantir le confort des spectateurs. Mais ces systèmes vont rapidement être améliorés et il ne fait pas de doute qu’ils se multiplieront dans les années à venir. Cette nouvelle façon de concevoir un planétarium est très enthousiasmante et de nombreuses installations de ce type sont en cours de réalisation.

 

Montreur d’étoiles : un beau métier sous les étoiles

En un siècle d’existence, les planétariums ont bénéficié d’un grand nombre de développements technologiques, mais la promesse initiale reste la même : voir les étoiles pour rêver et pour apprendre. De nombreuses vocations scientifiques résultent directement de la visite de tels équipements, et les montreurs d’étoiles qui animent chaque jour les planétariums enchanteront pendant encore longtemps tous les curieux venus passer un moment sous la coupole.

 

Sébastien FONTAINE | Unité Astronomie & Planétarium du Palais de la découverte

 

 

 

 

 

Le JWST prend un cliché infrarouge d’une géante gazeuse extrasolaire

Le JWST prend un cliché infrarouge d’une géante gazeuse extrasolaire

Le JWST a récemment obtenu une image directe, dans l’infrarouge, d’une exoplanète de type super-Jupiter. L’analyse de cette image et de données plus anciennes suggère que l’atmosphère de cette planète est enrichie en carbone et que sa température est de l’ordre de 275 K.

Images de l’exoplanète Eps Ind Ab obtenues par le coronographe du spectro-imageur MIRI du JWST aux longueurs d’onde 10,65 et 15,50 μm. L’étoile hôte (Eps Ind A), masquée par le coronographe, est au centre de l’image (étoile orange). Les barres blanches sur la figure de droite correspondent à des distances angulaires de 2,75” et 2,0”, soit 10 et 2,78 unités astronomiques. (© Matthews et al., 2024)

 

Parmi la vingtaine de planètes détectées jusqu’à présent par imagerie directe, toutes font partie de systèmes stellaires âgés de moins de 500 millions d’années, donc relativement jeunes. À l’aide du coronographe [1] du spectro-imageur MIRI installé sur le télescope spatial James-Webb (JWST), une équipe internationale d’astronomes conduite par Elisabeth Matthews, astrophysicienne au Max Planck Institute en Allemagne, et comprenant deux chercheurs de l’Observatoire de Paris-PSL vient d’obtenir une image infrarouge d’une exoplanète orbitant autour d’une étoile âgée d’environ 3,5 milliards d’années, Eps Ind A [2].

Cette étoile est située dans la constellation de l’Indien, à environ 11,8 années-lumière de la Terre. Elle est de type spectral KV5, donc un peu plus petite et moins massive que le Soleil. En 2003, des astronomes ont découvert une naine brune de masse comprise entre 40 et 60 fois la masse de Jupiter se déplaçant autour d’Eps Ind A. Les mesures de vitesse radiale disponibles à cette époque laissaient également entrevoir la présence, en plus de la naine brune, d’une planète géante dont l’existence n’a été confirmée qu’en 2018, sur la base de nouvelles mesures de la vitesse radiale. La masse de cette exoplanète, logiquement appelée Eps Ind Ab, avait alors été estimée à 3 fois la masse de Jupiter, et le demi-grand axe de son orbite à 11,6 unités astronomiques. L’image obtenue par le JWST apporte une confirmation supplémentaire (et directe) de son existence. En reprenant les mesures de vitesse radiale effectuées depuis une trentaine d’années, les astronomes ont pu aussi préciser ses propriétés et celles de son orbite. Selon ces nouvelles estimations, Eps Ind Ab serait ainsi plus massive que prévu, autour de 6,3 fois la masse de Jupiter, ce qui la range dans la catégorie des super-Jupiter, et elle se déplacerait sur une orbite très excentrique (e = 0,4) de demi-grand axe égal à 28,4 unités astronomiques, qu’elle accomplirait en environ 170 ans.

Les observations du JWST, effectuées dans l’infrarouge moyen, à 10,65 et 15,50 μm de longueur d’onde, permettent également d’apporter quelques informations sur l’atmosphère d’Eps Ind Ab. Les mesures de photométrie réalisées à ces longueurs d’onde sont compatibles avec les spectres d’émission calculés pour une atmosphère de planète géante gazeuse à une température de 300 K. Pour obtenir plus de précisions, des observations à d’autres longueurs d’onde sont nécessaires. En particulier, on s’attend à ce que l’atmosphère d’une géante gazeuse émette assez fortement autour de 3,5 et 5,0 μm, deux longueurs d’onde qui ne sont pas couvertes par MIRI. Les astronomes se sont donc tournés vers des images d’archive obtenues au VLT (Very Large Telescope) par deux spectro-imageurs différents : VIRIS, dont la gamme de longueurs d’onde est comparable à celle de MIRI et NaCo, qui couvre une gamme de longueurs d’onde plus petite, de 1 à 5 μm. Eps Ind Ab apparaît bien sur les images de VIRIS, mais pas sur celles de NaCo. Selon Elisabeth Matthews et ses collaborateurs, cette absence pourrait trahir la présence d’importantes quantités de méthane (CH4), de monoxyde de carbone (CO) et de dioxyde de carbone (CO2) dans l’atmosphère d’Eps Ind Ab, ces molécules étant responsables d’une forte absorption entre 3,5 et 5,0 μm. Autrement dit, l’atmosphère d’Eps Ind Ab serait enrichie en carbone. De plus, lorsque l’on tient compte de cet enrichissement, la comparaison entre les mesures de photométrie disponibles et les spectres d’émission théoriques suggèrent que la température de l’atmosphère d’Eps Ind Ab est de l’ordre de 275 K, ce qui en fait l’une des exoplanètes les plus froides observées à ce jour.

Les astronomes espèrent maintenant obtenir des images infrarouges d’autres géantes gazeuses d’âge comparable à celui de notre Système solaire. Plusieurs candidates sont en lice et devraient faire prochainement l’objet d’observation par le JWST. Les astronomes espèrent aussi réaliser des observations à des longueurs d’onde comprises entre 3,5 et 5,0 μm afin de déterminer lesquelles parmi ces planètes sont potentiellement enrichies en carbone et en autres éléments lourds.

 

Frédéric Deschamps – IESAS, Taipei, Taïwan

OISA et le Meeting RR Lyrae 2024  : Un Tremplin pour les Collaborations en Astronomie

OISA et le Meeting RR Lyrae 2024 : Un Tremplin pour les Collaborations en Astronomie

Le mois de novembre 2024 a marqué une avancée remarquable pour l’astronomie en Afrique, grâce à l’organisation de deux événements scientifiques de premier plan à Marrakech, Maroc : la huitième édition de l’École Internationale d’Astrophysique d’Oukaimeden (OISA) (co chair : jamila Chouqar/Abdelmajid Benhida) et le Meeting RR Lyrae et Céphéides 2024 (co-chair: Abdelmajid Benhida/ Zouhair Benkhaldoun):  https://cep24.uca.ma/  . 

Ces manifestations, orchestrées par l’Université Cadi Ayyad et l’Observatoire d’Oukaimeden, ont rassemblé des scientifiques, des éducateurs et des étudiants de divers horizons, affirmant le rôle de l’Afrique dans la recherche astronomique mondiale.

 

L’Observatoire d’Oukaimeden : Une Plateforme Unique pour la Recherche et la Collaboration

L’Observatoire d’Oukaimeden s’est imposé comme un acteur clé dans l’organisation de ces événements, offrant non seulement des infrastructures de recherche de pointe, mais aussi un cadre exceptionnel pour inspirer les collaborations scientifiques. Situé à plus de 2 700 mètres d’altitude dans les montagnes de l’Atlas, cet observatoire est devenu un pôle de convergence pour les chercheurs du monde entier, grâce à ses contributions majeures à des programmes internationaux et son engagement dans le développement des sciences en Afrique.

En accueillant des excursions et des ateliers pratiques, l’Observatoire a démontré son rôle central dans la vulgarisation scientifique et la sensibilisation à l’astronomie, tout en renforçant son image comme un catalyseur d’échanges scientifiques internationaux.

 

Une Équipe à l’Origine de Réalisations Remarquables

Ces événements ont été portés par une équipe dynamique et expérimentée, qui a également orchestré avec succès la cinquième conférence de l’African Astronomical Society (AfAS) en avril 2024 à Marrakech. Cette conférence avait rassemblé des acteurs clés de l’astronomie africaine et internationale, consolidant le rôle du Maroc comme un hub scientifique régional.

Par ailleurs, la même équipe a joué un rôle actif dans l’organisation de l’Assemblée Générale de l’Union Astronomique Internationale (IAU) en août 2024 à Cape Town, un événement majeur qui a réuni des milliers de scientifiques du monde entier. La gestion de ces deux rendez-vous, en parallèle des préparatifs pour OISA et le Meeting RR Lyrae, a représenté un défi de taille, relevé avec brio.

 

OISA 2024 : Une Formation d’Excellence au Service des Talents de Demain

L’École Internationale d’Astrophysique d’Oukaimeden (OISA) a réuni pendant cinq jours des participants africains et internationaux autour d’un programme intensif consacré à la physique stellaire. Grâce à des conférences animées par des experts mondialement reconnus et à des ateliers basés sur les données des missions spatiales (TESS, Kepler, Gaia), les participants ont approfondi des thématiques clés telles que les relations période-luminosité-couleur, la spectroscopie des étoiles variables et l’analyse des données astrophysiques.

OISA 2024 a également illustré l’engagement stratégique de l’Afrique dans le développement des compétences en astronomie. La collaboration avec des chercheurs sud-africains de renom a mis en lumière le potentiel du continent pour s’imposer comme un acteur incontournable de la recherche mondiale. L’accès à des infrastructures de pointe, comme le Southern African Large Telescope (SALT), ainsi que l’échange d’expertises, témoignent de l’ambition croissante de la communauté astronomique africaine.

 

Le Meeting RR Lyrae et Céphéides : Un Rendez-vous d’Envergure Internationale

Quelques jours après OISA, le Meeting RR Lyrae et Céphéides 2024 a rassemblé 90 participants originaires de 26 pays dans un format hybride innovant. Ce cinquième rendez-vous a abordé des enjeux scientifiques majeurs autour des pulsateurs classiques – les RR Lyrae et les Céphéides – éléments essentiels pour la mesure des distances cosmiques et la compréhension de l’évolution stellaire.

Le programme, soigneusement élaboré, a exploré des thématiques complexes telles que l’effet Blazhko, les contributions des missions spatiales telle que GAÏA, et les perspectives offertes par les projets terrestres. Des sessions dédiées ont également permis de valoriser les capacités de l’Observatoire d’Oukaimeden, renforçant son positionnement comme un acteur incontournable de l’astronomie au sol.

Des Intervenants de Prestige pour un Contenu d’Exception

Ces événements se sont distingués par un programme scientifique d’une qualité exceptionnelle. Parmi les intervenants, Adam Riess, Prix Nobel de Physique 2011, a captivé l’audience avec une conférence portant sur les limites et promesses du télescope spatial James Webb dans le contexte de la tension de Hubble (différence de mesure entre la méthode directe par mesures des distances, et la méthode utilisant le fond diffus cosmologique pour déterminer la vitesse de fuite des objets extragalactiques).

Des chercheurs de renom, tels que Kathy Vivas, Robert Szabó, Sylvia Ekström, Radek Smolec,  Katrien Kolenberg et Vincenzo Ripepi, ont enrichi les discussions avec des présentations couvrant des sujets variés : la modélisation numérique des pulsations stellaires, la photométrie spatiale et les implications des RR Lyrae et Céphéides pour la cosmologie. Ces échanges ont mis en lumière les avancées scientifiques récentes et ouvert la voie à de nouvelles collaborations.

Un Tremplin pour l’Astronomie Africaine dans le domaine des étoiles variables

En renforçant les compétences des chercheurs, en mobilisant des experts internationaux et en valorisant des infrastructures locales comme l’Observatoire d’Oukaimeden, ces événements ont consolidé la place de l’Afrique dans le paysage astronomique mondial. La synergie entre les chercheurs, les institutions et les infrastructures locales témoigne d’une ambition partagée : faire de l’Afrique un partenaire essentiel dans l’exploration scientifique de l’univers.

 

Astronomie pour Tous

Au cours de  ce meeting international RRL cep2024,  plusieurs  conférences grand public ont été données par des astrophysiciens de renommée internationale :  Kathy Vivas ( Université de Yale)  et Rachael Beaton (Princeton University)  . 

Les organisateurs se sont également fixés comme objectif de promouvoir l’astronomie inclusive et d’orienter les jeunes élèves vers les domaines STEM. Des visites à des internats de jeunes filles (Dar Taliba Marrakech) et à des écoles dans et autour de Marrakech qui promeuvent l’éducation pour les filles rurales, en particulier celles issues de milieux défavorisés, ont été organisées.

En conclusion, l’OISA 2024 et le Meeting RR Lyrae et Céphéides 2024 ont illustré avec brio le potentiel scientifique de l’Afrique. Ces événements ne se contentent pas de promouvoir l’excellence académique : ils construisent également un pont entre l’Afrique et la communauté scientifique internationale, ouvrant des perspectives prometteuses pour l’avenir de l’astronomie en générale et la physique stellaire en particulier , en prenant rendez vous pour une présence africaine encore plus importante au cours de la prochaine édition qui aura lieu en Chili en 2026.

 

par : Dr. Jamila Chouqar et Prof. Zouhair Benkhaldoun

Asamaan : les météores au Sénégal sous surveillance

Asamaan : les météores au Sénégal sous surveillance

Une équipe de recherche Franco-Sénégalaise, menée par François Colas (CNRS) et composée de membres de l’Université Numérique Cheikh Hane (UNHCK), de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (UCAD), et de l’Institut de Recherche pour le Développement (IRD) a installé entre 2022 et 2024 les premières caméras d’observation du ciel qui font partie d’un réseau mondial de surveillance des météores. Ce réseau est dénommé avec l’acronyme FRIPON qui signifie « Fireball Recovery and InterPlanetary Observation Network » (Réseau d’observation et de récupération des bolides interplanétaires). La partie Sénégalaise de ce réseau, déjà composée de 7 caméras, se nomme Asamaan, ce qui signifie Ciel en Wolof.

Dans le sillage de l’Initiative Africaine pour les Sciences des Planète et de l’Espace lancée fin 2017 (http://africapss.org), le Sénégal poursuit donc son aventure spatiale tous azimuts, sous l’impulsion et la vision de Maram KAIRE, Directeur de l’Agence Sénégalaise d’Etudes Spatiales, crée en 2022. La mise en place réussie de ce réseau est indissociable du succès des Espaces Numériques Ouverts (ENO) de l’UNCHK. Les ENO permettent à des milliers de jeunes Sénégalaises et Sénégalais, vivant loin de Dakar, ou des principales universités du pays, de suivre à distance des formations diplômantes. Ces bâtiments dotés d’une infrastructure numérique performante forment un maillage sur le territoire du Sénégal idéal pour le déploiement de capteurs scientifiques tels que les caméras du réseau Asamaan.

A quoi sert le réseau FRIPON, et pourquoi son extension au Sénégal (Asamaan) est importante ? Le réseau FRIPON a pour objectif la détection des météores et la recherche de nouvelles chutes de météorites. Il a pour but de répondre aux questions suivantes : Quelle quantité de matière interplanétaire tombe sur la Terre ? D’où viennent ces objets ? Quelle est leur origine ? Quels sont leurs corps parents ? Initié en France en 2013, son extension à d’autres pays a pour but d’atteindre une description toujours plus complète de la matière interplanétaire tombant sur la Terre pour une gamme de tailles de 1 cm à 1 mètre. Le Sénégal offre une opportunité de compléter les capacités de surveillance du réseau vers le ciel de l’hémisphère sud, où le manque de données est important (Fig. 1).

1. Carte des radiants des météores observés pour des tailles centimétriques à métriques par le réseau FRIPON (2016-2022, 7300 objets).
On constate le manque de données dans l’hémisphère sud qui sera en partie comblé par le réseau Asamaan.

 

Le réseau Asamaan est actuellement composé de 7 caméras installées sur le toit des ENO de Mbour, Diourbel, Kaolack, Louga, Linguère, Saint-Louis, et Podor. Les caméras couvrent une petite moitié ouest du pays. Le réseau comptera au final au moins 16 cameras, les installations se feront en fonction de l’ouverture prévue de nouveaux ENO. La multiplication des caméras permet aussi de déterminer avec précisions les trajectoires des météores (Fig. 2, exemple de détection multiple). Le réseau a permis à ce jour plusieurs dizaines de détections (Fig. 3). L’équipe du Laboratoire d’Astrophysique de Marseille, responsable du Service National d’Observation labellisé par le CNRS se charge de l’inclusion des données des caméras Sénégalaises dans la base de données globale du réseau FRIPON. Compte tenu de la surface du réseau Asamaan et du climat Sahélien on s’attend à obtenir ~400 observations par an ce qui est loin d’être négligeable comparé aux 1500 météores observés annuellement par le réseau FRIPON.

2. Exemple de détection multiple, Louga et Saint-Louis – 23/12/2024, 4h45 TU.

 

3. Carte des caméras installés du réseau Asamaan à ce jour superposée aux trajectoires des météores détectés par le réseau sur la période 2022 – 2024.

 

L’aspect le plus excitant du projet est bien sûr de retrouver des météorites après leur chute. Ceci est particulièrement important pour récupérer des météorites non altérées par l’atmosphère terrestre et qui sont dans des conditions proches de celles de l’espace pour permettre des études pétrographiques proches de celles que l’on fait pour les missions spatiales avec retour d’échantillon. A ce jour, aucune météorite enregistrée dans les collections ne provient du Sénégal. Le projet ambitionne donc d’offrir au Sénégal sa première météorite, et par la même occasion de communiquer au grand public comment ces objets nous permettent de déchiffrer nos origines. Les campagnes de recherche de météorites bénéficieront de l’expérience française du projet de science citoyenne Vigie-Ciel, et seront coordonnées par l’ASES, avec l’appui des membres de l’Association Sénégalaise pour la Promotion de l’Astronomie (ASPA).

par François COLAS (IMCCE), Salma SYLLA (UCAD), Absa GASAMA (UNCHK), David BARATOUX (IRD/GET), Pr Ousmane SALL (UNCHK) 

 

Remerciements : Ce projet bénéficie du soutien financier de l’IRD, du CNRS, de l’UNCHK. Le membres du projet remercie également les personnels des Espaces Numériques Ouverts pour leur accueil et les moyens mis en œuvre pour faciliter l’installation et la maintenance des services d’observation. Ces caméras ont été installé lors de deux missions dédiées, la dernière ayant eu lieu en novembre 2024, avec la participation sur le terrain de F. Colas (CNRS), D. Baratoux (IRD), S. Sylla (UCAD), A. Barro (UNCKH), I. C. Ba (UNCKH) et A.O. Diallo (IRD).

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