LE MAGAZINE DES SCIENCES DE L’UNIVERS EN AFRIQUE
Etoiles africaines: Shazrene Mohamed (Zimbabwe)

Etoiles africaines: Shazrene Mohamed (Zimbabwe)

Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?

Je m’appelle Shazrene Mohamed et je suis une astrophysicienne stellaire computationnelle zimbabwéenne. J’occupe actuellement un poste conjoint à l’Observatoire astronomique sud-africain et je suis professeure associée à l’Université du Cap en Afrique du Sud.

Shazrene Mohamed

Quel a été votre parcours pour devenir astronome?

À l’âge de 9 ans, j’avais tellement de questions sur les étoiles, sur les planètes – qu’est-ce qui les maintient là-haut ? Pourquoi brillent-elles ? De quoi sont-elles faites ? etc. que j’ai naïvement décidé que la meilleure façon d’obtenir des réponses à ces questions serait de devenir astronaute, de voyager dans « l’espace » et d’enquêter ! À la fin du lycée, je savais que je devais aller à l’université pour cela et je pensais que l’Amérique et la NASA seraient la voie à suivre. J’ai passé mes examens SAT I et II (ce sont des tests américains standardisés en mathématiques, en anglais et pour les tests de matières, j’ai fait de la biologie, de la chimie et de la physique). J’ai postulé dans 11 universités américaines qui accordaient des bourses complètes – j’ai trouvé leurs adresses dans un livre de notre bibliothèque publique, je leur ai écrit et ils m’ont envoyé les formulaires de candidature. J’ai ensuite utilisé près d’un mois de salaire pour envoyer les candidatures – en ne payant que les frais d’envoi… les choses vont beaucoup plus vite de nos jours si vous avez accès au courrier électronique ! En un rien de temps, j’ai pris mon premier vol de ma petite ville natale de Bulawayo à l’université de Harvard, aux États-Unis, où j’ai étudié l’astronomie, l’astrophysique et les mathématiques pour mon diplôme de premier cycle. Pendant que j’étais à Harvard, j’ai étudié le russe (je pensais que c’était une bonne chose au cas où j’aurais la chance de devenir cosmonaute), et j’ai rejoint le Corps d’entraînement des officiers de réserve de l’armée, car de nombreux astronautes avaient un passé militaire et c’était un moyen d’accéder à la citoyenneté, qui était une condition pour devenir astronaute à la NASA. Après les attaques terroristes du 11 septembre, cependant, les étudiants étrangers n’ont plus pu participer à ce programme… mais… alors que mon objectif de devenir astronaute s’est évanoui, j’ai été de plus en plus captivée par l’astronomie et la physique que j’apprenais dans mes cours. J’étais fascinée par les incroyables images du télescope spatial Hubble qui bordaient les couloirs et j’ai vite compris qu’il existait une autre façon d’obtenir les réponses à mes questions – en utilisant des télescopes, la physique, des simulations, etc. et c’est ainsi que mon parcours pour devenir astrophysicienne a commencé. Après quatre ans d’études, j’ai obtenu une bourse Rhodes pour préparer mon doctorat à l’université d’Oxford. J’y ai utilisé des superordinateurs pour modéliser les interactions des étoiles binaires – deux étoiles qui orbitent l’une autour de l’autre et peuvent échanger leur masse. Bien que mes études aient permis d’obtenir certaines réponses, les simulations que j’ai réalisées ont soulevé des questions encore plus passionnantes. À la fin de mon doctorat, j’ai eu la chance d’obtenir une bourse postdoctorale pour travailler à Bonn, en Allemagne, et j’ai continué à étudier comment certains échanges de masse dans ces binaires peuvent conduire à des explosions puissantes et lumineuses. J’ai également commencé à m’intéresser aux étoiles en fuite et à les modéliser, c’est-à-dire des étoiles qui se déplacent plus vite que la vitesse du son par rapport à leur environnement et qui produisent donc une onde de choc (un arc de choc) lorsqu’elles se déplacent dans la galaxie. Après mon post-doctorat, j’ai eu la chance de pouvoir travailler à l’Observatoire astronomique sud-africain, à un moment particulièrement excitant avec la montée en puissance du SALT (Southern African Large Telescope) et l’annonce du Square Kilometre Array à l’horizon. J’étais enthousiaste à l’idée de faire partie de la communauté astronomique grandissante du continent et j’ai eu l’occasion de partager cet enthousiasme en occupant un poste de vulgarisation et de recherche. C’était merveilleux de travailler avec l’équipe de vulgarisation du SCBP – amener l’astronomie vers les gens ! Quelques années plus tard, j’ai obtenu un poste conjoint à l’Observatoire et à l’Université du Cap et j’ai eu l’occasion d’enseigner et de partager mes recherches avec les étudiants. Maintenant, je dois chercher des réponses avec de nombreux collaborateurs en Afrique du Sud et dans le monde entier. Pour être honnête, nous finissons par trouver de plus en plus de bonnes questions !

Avez-vous ressenti des difficultés durant votre parcours?

Certainement ! Ce n’est pas toujours facile – il m’arrive souvent de rester bloquée sur un problème, par exemple lorsque mon code ne s’exécute pas ou qu’un bogue produit un comportement déroutant, mais il faut persévérer et c’est incroyablement satisfaisant de résoudre le problème. J’ai également eu la chance d’avoir des superviseurs très coopératifs et des modèles d’inspiration qui m’ont toujours encouragé à me dépasser et à continuer. J’ai également eu la chance d’avoir une famille et un mari très compréhensifs, qui m’ont accompagnés d’un pays à l’autre et se sont occupés de moi et de tout le reste lorsque j’avais des échéances ou des événements importants.

Quel(s) conseil(s) donneriez-vous aux jeunes filles de votre pays qui souhaitent étudier l’astrophysique?

Je vous dirais de foncer… suivez votre rêve, il vous mènera certainement loin ! Si vous avez accès à l’internet, il y a maintenant beaucoup d’informations sur les différents programmes, les bourses, les universités, etc. Essayez de les contacter pour leur demander des conseils directs. En attendant, travaillez dur à l’école – assurez-vous de vous appliquer, d’obtenir de bons résultats en sciences afin d’être prête et de pouvoir profiter de l’occasion qui se présentera. Parlez à vos professeurs et à d’autres professionnels – il est utile de trouver des mentors qui peuvent vous aider dans votre parcours. Ce ne sera pas facile, vous devrez donc croire en vous et persévérer. Les gens pensent souvent que la science est réservée aux « génies », mais ce n’est pas le cas. La plupart des avancées scientifiques sont le fait de personnes ordinaires qui travaillent dur et persévèrent. Depuis des milliers d’années, nous regardons le ciel nocturne et essayons de comprendre la place que nous y occupons. Nous savons, grâce à l’astronomie indigène, que nos ancêtres faisaient cela et utilisaient les étoiles dans leur vie quotidienne… l’astronomie fait partie de notre patrimoine scientifique, elle est dans notre ADN !

Pensez-vous qu’il y a des aspects/défis spécifiques qui concernent les femmes africaines en astrophysique?

Il y a de grands défis à relever. La première chose dont nous avons besoin est de nous assurer que les communautés sont conscientes des possibilités de faire carrière en astronomie. Ma famille et mes professeurs, par exemple, ne savaient même pas que c’était une option. Le fait d’avoir des modèles de femmes africaines visibles aurait certainement contribué à les convaincre plus facilement que ce n’était pas seulement une possibilité, mais aussi la bonne voie. L’accès à l’information et aux ressources est incroyablement important, mais il est en général encore très limité sur le continent. Les possibilités de poursuivre des études, les financements et les bourses d’études font cruellement défaut pour aider à soutenir les personnes qui se destinent à une carrière en astrophysique. D’autres obstacles doivent également être surmontés : les pressions sociétales, les stéréotypes, la discrimination, le racisme, le sexisme, les inégalités structurelles et les problèmes familiaux, tels que le manque de services de garde d’enfants, de congés parentaux et de soutien, font qu’il est plus difficile pour les femmes de poursuivre leur carrière et de fonder une famille. Ces choses commencent à changer, mais il reste encore beaucoup à faire !

Quels sont vos actions/projets en cours concernant l’astronomie?

C’est une période incroyablement excitante – la puissance de calcul toujours plus grande signifie que nous pouvons maintenant faire des modèles de plus en plus détaillés et précis des étoiles en fin de vie, et des étoiles géantes dans les binaires qui m’intéressent, et avec beaucoup de nouveaux télescopes puissants et même des observatoires multi-messagers en construction et certains déjà en ligne, nous aurons des données exquises sur ces étoiles pour comparer et contraindre les modèles. Cela signifie non seulement beaucoup plus de réponses, mais aussi beaucoup, beaucoup plus de questions intéressantes et intrigantes ! C’est aussi une période particulièrement excitante pour l’astronomie sur le continent. Notre communauté se développe rapidement, et je fais partie du sous-comité scientifique de la Société africaine d’astronomie (AfAS) qui s’efforce de faire en sorte que cela continue. Nous disposons déjà du SALT, l’un des plus grands télescopes optiques du monde, de MeerKAT, précurseur du plus grand radiotélescope du monde, ainsi que d’une multitude d’autres télescopes et installations en cours de développement sur le continent. Par l’intermédiaire de notre groupe, Astronomy in Colour (aic.saao.ac.za), nous nous efforçons également de trouver des solutions à bon nombre des défis auxquels les femmes africaines sont confrontées, mentionnés ci-dessus, afin de faire en sorte que l’astronomie soit un lieu où chacun peut s’épanouir. Je suis également très heureuse de faire partie de l’équipe qui travaille à la planification de l’Assemblée générale de l’Union Astronomique Internationale qui se tiendra au Cap en 2024 – la première fois que cette « coupe du monde » d’astronomie se déroulera sur le continent.

Etoiles africaines: Mayssa El Yazidi

Etoiles africaines: Mayssa El Yazidi

Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?

Je m’appelle Mayssa El Yazidi, je suis étudiante en doctorat au Centre d’études et d’activités spatiales « G. Colombo »- CISAS, à l’Université de Padoue. Je suis originaire de Tunisie, mais actuellement, j’étudie en Italie.

Mayssa El Yazidi

Quel a été votre parcours pour devenir astronome?

J’ai étudié la géologie à la Faculté des Sciences de Tunis, Université Tunis El Manar II, car en Tunisie nous n’avons pas de filière universitaire dédiée à l’astronomie ou à l’astrophysique. En 2014, j’ai eu mon diplôme de licence (licence fondamentale) et mon projet de recherche portait sur  » La géologie comparée des corps célestes du système solaire « . Par la suite, j’ai commencé mon master et en 2016, j’ai été diplômée et mon mémoire de master portait sur « La géologie de Mars ». En 2018, j’ai eu une bourse au Centre d’études et d’activités spatiales « G. Colombo »- CISAS, pour cartographier les grabens de Noctis Labirinthus sur Mars, et fin 2018, j’ai reçu une bourse de doctorat en sciences, technologies et mesures spatiales (CISAS), pour l’étude de la géologie de surface de Mars et Mercure.

Mon intérêt se concentre sur la composition et les processus responsables des modifications de la surface planétaire et des terrains analogues en utilisant différents jeux de données, les MNT, et la géo-modélisation 3D.

Qu’est ce qui vous a amené à étudier l’astronomie?

Depuis mon enfance, j’ai toujours été fascinée par l’astronomie, l’astrophysique et les sciences planétaires… J’étais toujours curieuse d’en savoir plus sur l’univers, les planètes qui sont relativement proches de nous, la possibilité de vie en dehors de la planète Terre et si l’humain est capable de vivre sur une autre planète.

En 2011, lorsque j’ai commencé à étudier à l’université, ma professeure Slim Shimi Najet, était celle qui donnait un cours d’introduction bref sur les planètes et le système solaire, avant de commencer le cours sur la Terre et sa géologie. A cette époque, la professeure Shimi Najet m’a encouragée et a amélioré ma curiosité pour en savoir plus sur les planètes et l’univers, et avec elle, j’ai commencé ma carrière et mes recherches et elle a été ma superviseur pour mes projets de recherche de licence et de master, pendant 6 ans.

Avez-vous ressenti des difficultés durant votre parcours?

Actuellement non ! J’étudie dans l’une des meilleures universités du monde, l’université de Padoue, et j’habite dans la ville de Galilée. Je suis fière et heureuse de mon travail et de mes recherches actuelles.

Quel(s) conseil(s) donneriez-vous aux jeunes filles de votre pays qui souhaitent étudier l’astrophysique?

NE RENONCEZ JAMAIS ! NE PERDEZ JAMAIS ESPOIR !

Ce ne sera pas un chemin facile. J’ai postulé pour plus de 400 postes (maîtrise, bourse de doctorat, bourse de recherche…) dans le monde entier jusqu’à ce que finalement, j’en obtienne un.

Croyez en vous ! Croyez en votre rêve et battez-vous pour l’obtenir.

Si vous avez quitté l’astrophysique, quel a été l’apport de vos études dans ce domaine pour votre carrière/vie?

J’aurai une formation scientifique, la capacité d’écrire des articles et des documents scientifiques, j’en saurai plus sur l’univers et les planètes, je pourrai faire des activités de vulgarisation et montrer au public (étudiants, enfants, adultes, astronomes amateurs), à l’aide d’un télescope, les planètes, la lune, les galaxies…..

Je serai en mesure d’aider aux activités éducatives puisque l’astrophysique est principalement basée sur la physique et les mathématiques, donc je pourrai soutenir et aider aux projets académiques et avoir une carrière scientifique.

Pensez-vous qu’il y a des aspects/défis spécifiques qui concernent les femmes africaines en astrophysique?

Je pense que le défi le plus difficile à relever est que dans votre pays, il n’y a pas d’universités, de facultés ou d’instituts pour enseigner l’astronomie ou l’astrophysique, et donc vous allez vous retrouver obligée d’émigrer dans un autre pays pour étudier ce dont vous rêviez.

Nous espérons donc voir un jour tous les pays d’Afrique enseigner l’astronomie, l’astrophysique, les sciences planétaires et l’aérospatiale ! Ce sera le plus beau rêve du monde !

En outre, d’après mon expérience personnelle, je trouve qu’il n’y a pas assez de bourses d’études destinées aux femmes pour les encourager et les aider à étudier l’astronomie.

Quels sont vos actions/projets en cours concernant l’astronomie?

Actuellement, je travaille en tant que coordinatrice nationale de la vulgarisation en astronomie pour la Tunisie au bureau de la vulgarisation en astronomie de l’union astronomique internationale (OAO/IAU) et je suis une associée active de la commission C2/ de cette union. Avec le comité national de la vulgarisation en Tunisie, nous encourageons les activités de diffusion des connaissances  et sensibilisons les gens à l’importance de l’astronomie et de l’astrophysique dans le développement des sciences et de l’éducation.

Nous organisons plusieurs activités (conférences en ligne, observations, concours, ateliers et séminaires) en plus de l’AstroCamping et des formations en astronomie et en astrophotographie en collaboration avec différentes associations et clubs d’astronomie tunisiens.

Etoiles africaines: Zara Randriamanakoto (Madagascar)

Etoiles africaines: Zara Randriamanakoto (Madagascar)

Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?

Je m’appelle Zara Randriamanakoto, chercheuse postdoctorale à l’Observatoire astronomique sud-africain (Afrique du Sud). Je suis également maître de conférences invitée à l’Université d’Antananarivo, à Madagascar (mon pays d’origine).

Zara Randriamanakoto

Quel a été votre parcours pour devenir astronome?

J’ai fait mon premier cycle en physique, puis un BSc Honours en physique énergétique à l’Université d’Antananarivo. J’ai ensuite suivi des études de troisième cycle en astronomie et astrophysique (BSc Honours, Master puis Thèse de doctorat) à l’Université du Cap. J’ai obtenu mon doctorat en astronomie en 2015. Entre 2015 et 2018, j’ai été postdoc SKA dans cette même université.

 

Qu’est ce qui vous a amené à étudier l’astronomie?

J’ai étudié l’astronomie parce que c’était une opportunité à ne pas manquer et un défi que je voulais relever. Madagascar avait besoin de jeunes experts dans ce domaine étant donné son implication dans le projet SKA sud-africain en tant que pays africain partenaire lors de la candidature de l’Afrique du Sud pour accueillir  SKA, le futur plus grand observatoire du monde. Aujourd’hui, l’astronomie est également devenue ma grande passion.

 

Avez-vous ressenti des difficultés durant votre parcours?

Les principaux défis que j’ai rencontrés sont les barrières linguistiques (passage du français à l’anglais), l’exposition à une culture diversifiée en Afrique du Sud et surtout l’adaptation au nouveau système éducatif de l’université du Cap (qui a nécessité beaucoup d’auto-apprentissage, d’autodiscipline et de persévérance).

 

Quel(s) conseil(s) donneriez-vous aux jeunes filles de votre pays qui souhaitent étudier l’astrophysique?

Ayez l’audace de protéger vos rêves, si vous pouvez en rêver, vous pouvez le faire. Si vous aspirez à devenir astrophysicienne, commencez à construire votre chemin vers votre objectif. Trouvez un ou une  mentor en cours de route.

 

Pensez-vous qu’il y a des aspects/défis spécifiques qui concernent les femmes africaines en astrophysique?

Pas spécifiquement pour les femmes africaines, mais pour la plupart des femmes dans ce domaine et dans tout autre domaine lié aux STIM (Science, Technologie, Ingénierie, Mathématiques) : les stéréotypes sexistes et l’incapacité à briser le plafond de verre. J’ai eu la chance de ne pas avoir été personnellement témoin de tels défis jusqu’à présent.

 

Quels sont vos actions/projets en cours concernant l’astronomie?

Au niveau des recherches, j’étudie les jeunes amas d’étoiles massives hébergés par des galaxies en interaction et des galaxies en anneau de combustion afin d’étudier l’effet de l’environnement sur les mécanismes de formation et d’évolution de ces proto-amas. Je recherche également des radiogalaxies mourantes et redémarrées à l’aide de LOFAR et MeerKAT afin de mieux comprendre le cycle de vie des radiogalaxies. Ressources humaines et sensibilisation : En plus d’être le coordinateur national du Bureau de l’UAI pour la sensibilisation à l’astronomie, je suis également la présidente fondatrice de Malagasy Astronomy & Space Science, une organisation à but non lucratif qui réunit de jeunes professionnels malgaches (titulaires d’un doctorat en astronomie), des membres étudiants et des amateurs dans le but de promouvoir la science et l’astronomie dans le pays. Nous organisons actuellement la deuxième édition d’un Quiz Astro National connu sous le nom de « Le Rendez vous des Astrophiles ». (Consultez notre page Facebook « Malagasy Astronomy and Space Science » pour plus d’informations). J’occupe également le poste de représentante des jeunes chercheuses et chercheurs au sein de la Société africaine d’astronomie, qui a été relancée.

Etoiles africaines: Sthabile Kolwa (Zambie, Afrique du Sud)

Etoiles africaines: Sthabile Kolwa (Zambie, Afrique du Sud)

Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?

Lumela ! C’est ce qu’on dit en Sesotho, langue d’Afrique australe.  Bonjour au monde! Je m’appelle Sthabile Kolwa et je suis un astronome en début de carrière à l’Université de Johannesburg. Mon domaine d’intérêt particulier est l’évolution des radiogalaxies que j’étudie par le biais d’observations à plusieurs longueurs d’onde, y compris les données de notre merveilleux radiotélescope MeerKAT. J’ai des origines sud-africaines et zambiennes et j’ai grandi dans la ville vibrante et colorée de Jozi, où je réside et travaille actuellement.

Sthabile Kolwa

Quel a été votre parcours pour devenir astronome?

Enfant, j’appréciais les émissions de télévision telles que « Bill Nye the Science Guy » (une élision américaine) et « Popular Mechanics for Kids » (Super Mécanix, une émission canadienne), car j’étais fascinée par le fonctionnement du monde naturel et des objets fabriqués par l’homme, ainsi que par les élégantes lois de la physique. Mon cheminement vers l’astronomie a été consolidé par mes visites régulières dans les bibliothèques. À la bibliothèque de mon école primaire, en septième année (l’équivalent de la classe de 5ème), j’ai découvert un livre de Dorling Kindersley intitulé « Time and Space« , qui a déclenché ma fascination pour les trous noirs. Au cours de mon adolescence, j’ai découvert la vulgarisation scientifique grâce à Stephen Hawking, dont les écrits m’ont permis d’approfondir les concepts d’introduction à la physique et à l’astronomie d’une manière très amusante et humoristique.

Qu’est ce qui vous a amené à étudier l’astronomie?

Après avoir terminé mes études, j’ai pris une année sabbatique pour déterminer le diplôme que je voulais obtenir. Avec ce grand rêve d’étudier aux États-Unis, j’ai postulé auprès de quelques grandes écoles et j’ai obtenu une place à l’UChicago, où j’avais la possibilité de suivre des cours pendant deux ans et déclarer ma spécialisation en première année. Cependant, je n’ai pas obtenu suffisamment de parrainage pour y faire mes études. J’ai donc opté pour l’université du Cap et, après y avoir réfléchi, j’ai compris que suivre ma passion serait payant. Je me suis rappelé à quel point j’aimais l’astronomie et j’ai donc opté pour une spécialisation en astrophysique, et le voyage a commencé.

Avez-vous ressenti des difficultés durant votre parcours?

Oui, il y a eu des difficultés. Je me demandais parfois si j’étais assez bonne pour poursuivre cette carrière. En voyant la rareté des femmes noires dans ce domaine, travaillant comme chercheuses et conférencières, je me demandais si cette carrière était vraiment  faite pour des gens comme moi, vous voyez ? C’étaient les problèmes internes. Je peux dire avec fierté que j’ai travaillé très dur pour surmonter ce doute sur moi-même en maintenant des mantras positifs, en méditant et en m’affirmant dans les moments difficiles. En ce qui concerne le racisme, le sexisme et la queerphobie, qui sont le résultat de l’ignorance et de la peur, mon modus operandi est d’être excellente dans tout ce que je fais. Si j’ai une interaction gênante au travail, qui peut ou non être le résultat de préjugés, je me dis : « OK, c’est du carburant pour travailler plus dur ».

Si vous avez quitté l’astrophysique, quel a été l’apport de vos études dans ce domaine pour votre carrière/vie?

Si je devais quitter l’astrophysique, j’aurais acquis de nombreuses compétences en programmation (hourra Python !), en analyse de données, en communication professionnelle par l’écriture et le discours, en planification et l’exécution de programmes de recherche. Ces compétences sont inestimables dans le domaine de la technologie et dans d’autres domaines de recherche. Comme je travaille toujours en astrophysique, j’utilise ces compétences pour continuer à découvrir les mystères de l’Univers.

Pensez-vous qu’il y a des aspects/défis spécifiques qui concernent les femmes africaines en astrophysique?

Oui, nous sommes une minorité dans le domaine de l’astrophysique et il n’est pas toujours facile d’être la seule de son genre dans la pièce à un moment donné. On vous considère comme la représentante de toute votre race et un seul faux pas peut entraîner un désastre dans la façon dont vous êtes jugée par vos pairs, parfois. C’est une pression énorme. En outre, la nature contractuelle à court terme des post-docs et, dans certains cas, les retards de paiement aux chercheurs post-docs font que certaines femmes africaines abandonnent leurs travaux de recherche ou quittent carrément le domaine. Cela est particulièrement vrai lorsque l’on préfère une situation plus stable financièrement ou lorsque l’on est mère.

Quels sont vos actions/projets en cours concernant l’astronomie?

En ce moment, je travaille avec les données du continuum radio de MeerKAT+uGMRT ainsi qu’avec des observations multi-longueurs d’onde pour étudier les propriétés des sources radio très faibles. C’est intéressant car MeerKAT est si sensible qu’il capte des sources qui n’ont peut-être jamais été détectées auparavant. Avec l’uGMRT (upgraded Giant Metrewave Radio Telescope) à Pune, en Inde, je dispose de données étonnantes pour mes projets actuels.

Deux publicités éhontées pour terminer. Je fais partie d’une organisation appelée Astronomy in Colour, qui encourage le développement des femmes de couleurs, étoiles montantes dans le domaine de l’astronomie. Nous avons une chaîne Youtube  où nous présentons notre travail, comme la récente série de conférences « Trailblazers« .

Deuxièmement, le projet Astro Molo Mhlaba vise à encourager les écolières à s’orienter vers des carrières dans les STIM (Sciences, Technologie, Ingénierie et Mathématiques). Nous acceptons les dons pour financer des ateliers de programmation, des excursions et d’autres activités amusantes qui renforcent la confiance des filles dans leurs capacités intellectuelles et leur rappellent ce qui est possible dans leur vie.

Etoiles africaines: Sambatriniaina Rajohnson (Madagascar)

Etoiles africaines: Sambatriniaina Rajohnson (Madagascar)

Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?

Je m’appelle Sambatriniaina Rajohnson. Je suis originaire de Madagascar et en ce moment je suis en deuxième année de Doctorat à l’Université du Cap, en Afrique du Sud.

Sambatriniaina Rajohnson

Quel a été votre parcours pour devenir astronome?

Après l’obtention de mon baccalauréat scientifique (série C) en 2012, j’ai décidé de poursuivre mes études universitaires en Physique à l’Université d’Antananarivo, où j’ai obtenu mon diplôme de Licence en 2015. Arrivée en 4ème année, on devait tous choisir une branche de la Physique afin de se spécialiser. Pour ma part, j’ai entendu dire qu’un nouveau cursus venait tout juste d’être implémenté à l’Université: c’était l’Astrophysique. Sans hésiter, j’ai tout de suite choisi de joindre ce parcours et je vous expliquerai mes raisons plus bas. Puis, en 2018, tout en préparant ma thèse de Master, j’ai participé au programme « Development in Africa with Radio Astronomy » (DARA). Il s’agissait d’une formation technique en Radio Astronomie pour former les étudiants originaires des huit pays africains faisant partie de l’African VLBI Network, un réseau de radiotélescopes en Afrique. Je pense que c’est surtout cette formation qui m’a inspirée et dirigée dans le choix de mes futurs parcours professionnels. Elle m’a également permis de trouver un superviseur afin de poursuivre mes études de Doctorat à l’Université du Cap.

Qu’est ce qui vous a amené à étudier l’astronomie?

J’ai toujours aimé les matières scientifiques, surtout la physique quand j’étais plus jeune. Avec une imagination débordante, j’adore la science-fiction et les documentaires sur l’astronomie. Je me posais tout le temps des questions sur les origines de notre Univers, sommes-nous vraiment seuls? Le ciel, les étoiles et ses mystères m’ont en même temps toujours fascinés et intrigués. Cependant, je pensais que ce n’était juste que des rêves et qu’il fallait un jour poser mes pieds sur Terre car à cette époque-là, je ne pensais pas que devenir astronome serait possible. Mais dès que j’ai su que le parcours astronomie existait à Madagascar, je savais que mon rêve allait se réaliser. C’est pourquoi je me suis directement inscrite. Je savais que ce ne serait pas du tout facile, mais c’était un défi à relever.

Avez-vous ressenti des difficultés durant votre parcours?

Oui, en effet j’ai éprouvé quelques difficultés notamment sur le plan financier et matériel, mais cela ne m’a pas empêché d’avancer dans mon travail. Par exemple, ne pas avoir accès à une connexion internet ni pouvoir accéder aux articles et revues payants étaient parfois problématiques dans l’accomplissement de mes travaux de recherches.

Quel(s) conseil(s) donneriez-vous aux jeunes filles de votre pays qui souhaitent étudier l’astrophysique?

Je pense que ces conseils seront valables pour n’importe quels domaines du STEM (Science, Technologie, Ingénierie et Mathématiques). Osez et soyez déterminées à accomplir vos rêves jusqu’au bout car il n’y a pas de rêves trop grands. Si vous aimez les matières scientifiques, la programmation, et que vous ayez un esprit critique sur notre Univers, n’hésitez pas, l’astronomie est faite pour vous et vous avez le potentiel !

Si vous avez quitté l’astrophysique, quel a été l’apport de vos études dans ce domaine pour votre carrière/vie?

L’astronomie se base sur l’analyse des données sur les phénomènes célestes. Les différentes techniques de diagnostic que j’ai utilisées dans mes projets peuvent tout à fait être réutilisées dans n’importe quel domaine de recherches, ou même dans le secteur industriel. Donc si un jour, je devais quitter l’astrophysique, tout ce que j’aurai appris n’aurait pas été en vain. Je pourrai utiliser mes compétences en programmation informatique, en communication et rédaction. Être astronome ne se résume pas à ne faire que des recherches, c’est aussi partager nos passions et nos découvertes avec le public.

Pensez-vous qu’il y a des aspects/défis spécifiques qui concernent les femmes africaines en astrophysique?

La lutte contre les disparités sociales et culturelles fait encore bel et bien partie des défis pour l’épanouissement des femmes africaines. Beaucoup pensent encore que les domaines scientifiques tels que le STEM ne sont pas faits pour les femmes. D’ailleurs, nombreuses sont les filles qui n’ont pas le choix d’abandonner leurs études. Cependant, ces situations sont en train de changer lentement mais sûrement grâce au fait que de plus en plus de femmes modèles donnent l’exemple aux nouvelles générations.

Quels sont vos actions/projets en cours concernant l’astronomie?

Actuellement, mon projet de doctorat consiste à étudier l’évolution des galaxies en observant ses émissions d’hydrogène neutre. Plus précisément, il s’agit de cartographier et de découvrir les galaxies se situant derrière le plan galactique de la Voie lactée, vers la constellation de Vela, afin de connaître les structures à grande échelle de l’Univers. Ces observations sont difficiles à obtenir en raison de  l’intense densité stellaire et la présence de poussières dans le plan galactique, rendant ces galaxies uniquement visibles qu’aux longueurs d’onde radios et infrarouges. Cependant, ces découvertes nous aideront à identifier de nouvelles structures et leurs implications dans l’évolution de l’Univers.

Etoiles africaines: Tamador Khalil Mansoor (Soudan)

Etoiles africaines: Tamador Khalil Mansoor (Soudan)

Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?

Je m’appelle Tamador Khalil Mansoor, suis  maître de conférences à l’université islamique d’Omdurman, et vis à  Khartoum, au Soudan.

Tamador Khalil Mansoor

Quel a été votre parcours pour devenir astronome?

Je suis diplômée de la faculté des sciences et de la technologie, au département d’astronomie et de météorologie.

 

Qu’est ce qui vous a amené à étudier l’astronomie?

Je m’intéresse beaucoup à l’astronomie car je considère toujours que c’est le sujet le plus passionnant. En outre, elle soulève de nombreuses questions auxquelles on peut répondre mieux et plus concrètement sur le plan scientifique. Il a été très difficile de prendre une décision entre l’astronomie et la météorologie, mais après des discussions avec des collègues et des professeurs, j’ai choisi l’astronomie.

Avez-vous ressenti des difficultés durant votre parcours?

J’ai rencontré de nombreuses difficultés en tant qu’étudiante.  Durant mes premières années à l’université, j’avais de nombreux plans pour ma future carrière, des plans A, B et C qui m’ont rendu confuse et je ne me suis pas concentrée sur mes études, l’un d’entre eux était de quitter le département. J’ai fait cela parce que j’ai vu ces plans comme une opportunité, j’ai été obligé de prendre une décision que je n’aurais jamais pensé prendre.

Quel(s) conseil(s) donneriez-vous aux jeunes filles de votre pays qui souhaitent étudier l’astrophysique?

Je ne donnerais pas le conseil de travailler dur, d’étudier avec assiduité, d’investir du temps parce que ce sont des choses que vous devez absolument faire si vous décidez d’étudier l’astrophysique. Je vous dirais plutôt de prendre tous les cours et toutes les choses pendant vos études et votre parcours universitaire comme une clé qui peut vous conduire sur les bons chemins.  Vous devez faire face à tous les défis que vous rencontrez parce que vous apprendrez beaucoup de choses. La chose la plus importante est la communication académique et l’engagement scientifique.

Si vous avez quitté l’astrophysique, quel a été l’apport de vos études dans ce domaine pour votre carrière/vie?

Comme les astrophysiciens traitent d’énormes quantités de données, je pense que je pourrais travailler dans un domaine qui nécessite de la programmation informatique, de la modélisation informatique, de l’analyse statistique et des outils informatiques, où je pourrais très probablement finir avec  un poste d’enseignante quelque part.

Pensez-vous qu’il y a des aspects/défis spécifiques qui concernent les femmes africaines en astrophysique?

Je pense que les aspects qui affectent les femmes africaines dans leur carrière ou leur parcours d’études sont la discrimination basée sur la couleur de leur peau ou leur sexe. L’histoire nous l’a bien expliqué.

Ces aspects peuvent être un défi lorsque ces choses se produisent, comme le montre l’étude  ”Women of Color in Astronomy Face Greater Degree of Discrimination, Harassment” (“Les femmes de couleur en astronomie font face à plus de discrimination et de harcèlement que les autres, étude publiée le lundi 10 juillet 2017 dans le Journal of Geophysical Research), et je cite l’auteur “Ces choses affectent également la qualité de la science produite par un individu et la trajectoire de la carrière de cet individu” .

Quels sont vos actions/projets en cours concernant l’astronomie?

Je fais des recherches dans le domaine des exoplanètes (caractérisation, formation et classification) et de la recherche sur les astroparticules.

Je suis l’une des organisatrices de l’école annuelle soudanaise d’astro-informatique.

 

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