LE MAGAZINE DES SCIENCES DE L’UNIVERS EN AFRIQUE
Etoiles africaines: Arwa Dabbech (Tunisie)

Etoiles africaines: Arwa Dabbech (Tunisie)

Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?

Je m’appelle Arwa Dabbech, je suis tunisienne. Je suis actuellement chercheuse associée au groupe Biomedical and Astronomical Signal Processing (BASP),  de l’Université Heriot-Watt à  Edimbourg en Ecosse.

Arwa Dabbech

Quel a été votre parcours pour devenir astronome?

Mon parcours en astronomie a commencé par un stage de recherche effectué à l’Observatoire de la Côte d’Azur, à Nice, en France, en 2011, dans le cadre de mes études d’ingénieur. Le sujet portait sur l’étude des algorithmes d’imagerie en astronomie. Après avoir obtenu mon diplôme d’ingénieur de l’Ecole Polytechnique de Tunisie en 2011, j’ai poursuivi mes études de doctorat à l’Observatoire de La Côte d’Azur. Le sujet de recherche était la déconvolution des images en radioastronomie en bande centimétrique pour l’exploitation des radio-interféromètres modernes. En 2015, j’ai obtenu mon doctorat en Sciences de l’Univers à l’Université de Nice Sophia Antipolis. Depuis 2015, je suis chercheuse postdoctorale au sein du groupe BASP, qui est affilié à l’Université Heriot Watt, à Edimbourg, au Royaume-Uni.

Qu’est ce qui vous a amené à étudier l’astronomie?

Je suis à la fois fascinée par la beauté de l’Univers, capturée par les télescopes modernes, et excitée par les défis du traitement des données qui accompagnent notre quête d’une meilleure compréhension de l’Univers.

Avez-vous ressenti des difficultés durant votre parcours?

J’ai eu la chance d’être encadrée et entourée de chercheurs et d’étudiants diplômés inspirants pendant mon stage de recherche et mes études de doctorat à l’étranger. Cependant, la principale difficulté était d’être loin de ma famille et de mes amis.

Quel(s) conseil(s) donneriez-vous aux jeunes filles de votre pays qui souhaitent étudier l’astrophysique?

Le mois dernier, les Tunisiens ont assisté au lancement de « Challenge One », le tout premier satellite fabriqué en Tunisie. Bien qu’il s’agisse d’une petite réalisation dans le domaine aérospatial, il s’agit certainement d’une étape importante pour la Tunisie. De tels projets ouvriront, espérons-le, les horizons de l’astronomie, des sciences spatiales et de l’astrophysique. Alors, levez les yeux vers les étoiles !

Pensez-vous qu’il y a des aspects/défis spécifiques qui concernent les femmes africaines en astrophysique?

Je pense qu’en Afrique, les défis de l’astrophysique ne sont pas spécifiques aux femmes. D’une part, dans de nombreux pays africains, la discipline est tout simplement inexistante. D’autre part, jusqu’à présent, la recherche n’a pas été une grande priorité dans les universités africaines. Pourtant, nous vivons actuellement une époque passionnante puisque le plus grand radiotélescope du monde, le Square Kilometer Array (SKA), est en cours de construction en Australie et en Afrique du Sud et s’étendra à terme sur de nombreux pays africains. Ce projet à grande échelle a stimulé l’astrophysique en tant que discipline dans de nombreux pays africains. Je pense que les femmes africaines seront le moteur de cette discipline, car leur présence dans les STIM (Science, Technologies, Ingénierie et Mathématiques) est remarquablement élevée dans de nombreux pays africains comme la Tunisie.

Quels sont vos actions/projets en cours concernant l’astronomie?

Mes projets de recherche actuels au sein du groupe BASP s’articulent autour (i) du développement de nouvelles techniques de reconstruction d’images robustes et évolutives pour la radioastronomie et (ii) de leur validation sur des données à grande échelle provenant d’instruments précurseurs et explorateurs du futur SKA. Ces projets sont menés en étroite collaboration avec le National Radio Astronomy Observatory (NRAO, USA) et le South African Radio Astronomy Observatory (SARAO, Afrique du Sud).

Etoiles africaines: Marie Korsaga (Burkina Faso)

Etoiles africaines: Marie Korsaga (Burkina Faso)

Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?

Je me nomme Marie Korsaga, originaire du Burkina Faso et astrophysicienne affiliée à l’Université Joseph Ki-Zerbo de Ouagadougou. Je m’intéresse à l’étude de la dynamique des galaxies. Pour cela, j’étudie comment la matière est distribuée à l’intérieur des galaxies afin de mieux comprendre comment elles se forment et évoluent avec le temps.

Marie Korsaga

Quel a été votre parcours pour devenir astronome?

J’ai fait la majorité de mon cursus scolaire au Burkina Faso. Après un Bac scientifique, je me suis inscrite à l’Université Joseph Ki-Zerbo de Ouagadougou où j’ai fait une licence et une maîtrise de physique pure, un DEA (équivalent au Master du système LMD) de physique appliquée avec comme option de recherche astrophysique où j’ai travaillé sur la photométrie des naines brunes qui sont des objets à mi chemin entre les planètes et les étoiles, c’est à dire qu’ils sont plus massifs que les planètes mais moins massifs que les étoiles. Après le DEA, j’ai fait un stage de recherche au Laboratoire d’Astrophysique de Marseille (LAM) en France durant lequel j’ai étudié la cinématique des galaxies à partir des observations Fabry-Perot, avant de poursuivre une thèse de doctorat au LAM conjointement avec l’Université de Cape Town en Afrique du Sud où j’ai travaillé sur la distribution de la matière noire et de la matière lumineuse dans les galaxies.

Qu’est ce qui vous a amené à étudier l’astronomie?

Disons que depuis toute petite, je me suis toujours intéressée aux phénomènes de l’Univers à savoir l’apparition de la vie sur terre, les phénomènes d’éclipses, les étoiles filantes, etc. J’aimais aussi regarder les films documentaires sur l’astronomie, surtout sur les missions Apollo (présence de l’Homme sur la lune). Mais à l’époque je n’imaginais pas devenir astrophysicienne car l’astronomie était un domaine non connu au Burkina, et en plus je n’avais jamais rencontré (à plus forte raison échanger avec) un astronome dans la vie réelle avant ma licence. Donc en grandissant, j’avais l’intention de devenir ingénieure en génie civil car j’aime aussi la construction. A ma licence l’astronomie venait d’être intégrée au Burkina comme matière optionnelle en physique, je n’ai pas hésité à saisir l’opportunité. Aussi, mon intérêt pour les matières scientifiques m’a permis d’exceller plus facilement dans le domaine et éventuellement poursuivre des études de troisième cycle en astrophysique.

Avez-vous ressenti des difficultés durant votre parcours?

Faire des études dans un domaine scientifique quand on est une femme est un peu compliqué surtout quand on vient d’un pays comme le Burkina où la majorité des gens pensent que les domaines scientifiques sont dédiés aux hommes et pas aux femmes. Par exemple, j’étais confrontée à des propos du genre, la physique est trop compliquée pour une femme, tu ne pourras pas faire carrière dans le domaine, et même tu risques de devenir folle si tu continues. Ces propos ne m’ont pas influencée dans mon choix de carrière car j’aimais les matières scientifiques et j’avais aussi le soutien de ma famille. Surtout mon père qui me faisait chaque fois savoir que les femmes peuvent aussi faire de longues études et faire carrière dans les domaines scientifiques, cela me faisait avoir plus confiance en moi.

J’ai aussi rencontré des difficultés durant ma thèse. Je me rappelle bien pendant ma thèse quand les résultats que j’avais trouvés n’étaient pas concordants avec les études précédentes, il fallait alors s’assurer durant de longues périodes de la fiabilité de mes résultats à travers un travail rigoureux et minutieux. Cela nous a permis de découvrir que les relations entre les paramètres de la matière noire et la luminosité des galaxies n’étaient pas standards comme on le pensait auparavant, mais dépendent de la structure de la galaxie (présence ou pas de bulbe dans les galaxies). Je suis très heureuse de n’avoir pas baissé les bras pendant ces périodes difficiles même si à un moment donné j’avais l’impression que mon travail n’avançait pas.

Quel(s) conseil(s) donneriez-vous aux jeunes filles de votre pays qui souhaitent étudier l’astrophysique?

Ce que je peux dire aux jeunes filles c’est de lutter pour réaliser leurs rêves car personne ne les fera à leur place. De choisir des filières qui leur plaisent, car faire une chose qu’on aime est toujours un plaisir et pas une contrainte. Il est aussi très important d’avoir confiance en soi, c’est la clé de la réussite. Les maths et la physique sont difficiles certes, mais si les hommes peuvent faire carrière là- dedans, pourquoi pas les femmes. Ce n’est pas parce qu’on est une femme qu’on doit se mettre à l’idée de ne pas être capable de faire des choses dites difficiles. Il faut aussi noter qu’il n’y a rien de facile dans la vie. Faire carrière en astrophysique nécessite un parcours en physique et mathématiques, donc il faut déjà cultiver l’amour pour ces matières scientifiques durant le parcours scolaire pour pouvoir continuer en astrophysique. Aussi, j’aimerais ajouter que l’astronomie est une science fascinante et qui regorge de mystères qui restent à être élucidés.

Quels sont vos actions/projets en cours concernant l’astronomie?

Au-delà de la recherche, je contribue à la formation des jeunes en sciences au Burkina à travers l’enseignement que je dispense dans des universités. Je travaille avec des collègues (au Burkina et à l’international) sur plusieurs projets visant à promouvoir les sciences de l’espace dont l’astronomie partout en Afrique afin de contribuer au développement socio-économique du continent. De ce fait, je suis coordinatrice scientifique pour l’astronomie sur des projets entre des pays africains et européens qui visent à renforcer le développement des sciences spatiales en général et de l’astronomie en particulier en Afrique, je suis aussi membre de l’Union Astronomique Internationale, membre du comité de rédaction du magazine  L’Astronomie Afrique, qui est un magazine en ligne et gratuit sur l’astronomie en Afrique, etc.

Aussi, en matière d’éducation des filles en Afrique, il y a une stigmatisation qui fait que les filles ne s’orientent pas généralement dans les filières scientifiques car ce sont des filières dites adaptées aux hommes et pas aux femmes car très difficiles. Donc déjà, ça crée une barrière pour les filles qui, dès les premiers obstacles, ont tendance à abandonner. De ce fait, je compte mener des actions en vue de vulgariser l’éducation de la science en général, et de l’astrophysique en particulier dans les pays où l’accès à la science est limité. Cela servira à motiver les jeunes filles et garçons (surtout les jeunes filles) à embrasser les filières scientifiques.

Etoiles africaines: Nikhita Madhanpall (Afrique du Sud)

Etoiles africaines: Nikhita Madhanpall (Afrique du Sud)

Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?

Je m’appelle Dr Nikhita Madhanpall. Je suis actuellement Big Data Fellow et je travaille pour le bureau de l’astronomie pour le développement au Cap, en Afrique du Sud. Je suis originaire du KwaZulu-Natal, en Afrique du Sud.

Nikhita Madhanpall

Quel a été votre parcours pour devenir astronome?

Après l’école, j’ai étudié pour obtenir une licence en physique informatique, où j’ai appris à résoudre des problèmes de physique complexes à l’aide de la programmation. Après avoir obtenu un diplôme spécialisé en physique informatique, j’ai déménagé au Cap pour poursuivre une maîtrise en astronomie dans le cadre du programme NASSP de l’université du Cap. J’ai obtenu mon MSc et mon doctorat en astronomie à l’université de Western Cape et mon domaine de recherche était l’astronomie extragalactique et la cosmologie – l’étude de la rigueur à grande échelle afin de mieux contraindre les propriétés de la matière noire.

Qu’est ce qui vous a amené à étudier l’astronomie?

J’ai eu la chance d’avoir un ciel assez sombre là où j’ai grandi et j’ai été intriguée par le ciel nocturne, l’espace et la cosmologie dès mon plus jeune âge.

Avez-vous ressenti des difficultés durant votre parcours?

Oui. Il m’est arrivé d’être jugée sur mon apparence (sexe et origine ethnique) plutôt que sur mes capacités. J’ai constaté que les professeurs n’attendaient pas grand-chose de moi et étaient surpris lorsque j’obtenais de bons résultats.

Quel(s) conseil(s) donneriez-vous aux jeunes filles de votre pays qui souhaitent étudier l’astrophysique?

Si l’astronomie vous intrigue ou vous passionne, travaillez dur à l’école et concentrez-vous sur les mathématiques, la physique et l’informatique. L’astronomie est pour tout le monde ! À l’université, ne laissez pas les autres vous persuader de suivre une autre voie, continuez à poursuivre vos rêves.

Si vous avez quitté l’astrophysique, quel a été l’apport de vos études dans ce domaine pour votre carrière/vie?

J’ai acquis de bonnes compétences en programmation et en résolution de problèmes, ce qui m’a permis d’explorer le domaine de la science des données et de l’apprentissage automatique.

Pensez-vous qu’il y a des aspects/défis spécifiques qui concernent les femmes africaines en astrophysique?

En raison du manque de représentation ou d’interaction avec d’autres femmes ou des femmes de couleur dans la communauté des astronomes, de nombreuses femmes africaines peuvent avoir un sentiment de non-appartenance dans ce domaine ou douter de l’opportunité de poursuivre leurs recherches en astronomie. Nous devons donc créer des plates-formes et des groupes pour mettre en valeur les femmes africaines en astronomie et nous fournir mutuellement du mentorat et du soutien.

Quels sont vos actions/projets en cours concernant l’astronomie?

Je travaille actuellement au Bureau de l’astronomie pour le développement, où j’utilise des compétences et des techniques couramment utilisées en astronomie, telles que la science des données et l’apprentissage automatique, afin d’avoir un impact positif sur les objectifs de développement durable. Avec le soutien de DARA Big Data, je développe des ressources éducatives pour des événements de hackathon de développement des compétences en science des données et j’organise ces événements dans des pays d’Afrique.

L’astronomie, c’est pour tout le monde ! Si vous avez une passion pour l’astronomie, partez à la conquête, ne vous découragez pas.

 

 

 

Etoiles africaines: Shazrene Mohamed (Zimbabwe)

Etoiles africaines: Shazrene Mohamed (Zimbabwe)

Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?

Je m’appelle Shazrene Mohamed et je suis une astrophysicienne stellaire computationnelle zimbabwéenne. J’occupe actuellement un poste conjoint à l’Observatoire astronomique sud-africain et je suis professeure associée à l’Université du Cap en Afrique du Sud.

Shazrene Mohamed

Quel a été votre parcours pour devenir astronome?

À l’âge de 9 ans, j’avais tellement de questions sur les étoiles, sur les planètes – qu’est-ce qui les maintient là-haut ? Pourquoi brillent-elles ? De quoi sont-elles faites ? etc. que j’ai naïvement décidé que la meilleure façon d’obtenir des réponses à ces questions serait de devenir astronaute, de voyager dans « l’espace » et d’enquêter ! À la fin du lycée, je savais que je devais aller à l’université pour cela et je pensais que l’Amérique et la NASA seraient la voie à suivre. J’ai passé mes examens SAT I et II (ce sont des tests américains standardisés en mathématiques, en anglais et pour les tests de matières, j’ai fait de la biologie, de la chimie et de la physique). J’ai postulé dans 11 universités américaines qui accordaient des bourses complètes – j’ai trouvé leurs adresses dans un livre de notre bibliothèque publique, je leur ai écrit et ils m’ont envoyé les formulaires de candidature. J’ai ensuite utilisé près d’un mois de salaire pour envoyer les candidatures – en ne payant que les frais d’envoi… les choses vont beaucoup plus vite de nos jours si vous avez accès au courrier électronique ! En un rien de temps, j’ai pris mon premier vol de ma petite ville natale de Bulawayo à l’université de Harvard, aux États-Unis, où j’ai étudié l’astronomie, l’astrophysique et les mathématiques pour mon diplôme de premier cycle. Pendant que j’étais à Harvard, j’ai étudié le russe (je pensais que c’était une bonne chose au cas où j’aurais la chance de devenir cosmonaute), et j’ai rejoint le Corps d’entraînement des officiers de réserve de l’armée, car de nombreux astronautes avaient un passé militaire et c’était un moyen d’accéder à la citoyenneté, qui était une condition pour devenir astronaute à la NASA. Après les attaques terroristes du 11 septembre, cependant, les étudiants étrangers n’ont plus pu participer à ce programme… mais… alors que mon objectif de devenir astronaute s’est évanoui, j’ai été de plus en plus captivée par l’astronomie et la physique que j’apprenais dans mes cours. J’étais fascinée par les incroyables images du télescope spatial Hubble qui bordaient les couloirs et j’ai vite compris qu’il existait une autre façon d’obtenir les réponses à mes questions – en utilisant des télescopes, la physique, des simulations, etc. et c’est ainsi que mon parcours pour devenir astrophysicienne a commencé. Après quatre ans d’études, j’ai obtenu une bourse Rhodes pour préparer mon doctorat à l’université d’Oxford. J’y ai utilisé des superordinateurs pour modéliser les interactions des étoiles binaires – deux étoiles qui orbitent l’une autour de l’autre et peuvent échanger leur masse. Bien que mes études aient permis d’obtenir certaines réponses, les simulations que j’ai réalisées ont soulevé des questions encore plus passionnantes. À la fin de mon doctorat, j’ai eu la chance d’obtenir une bourse postdoctorale pour travailler à Bonn, en Allemagne, et j’ai continué à étudier comment certains échanges de masse dans ces binaires peuvent conduire à des explosions puissantes et lumineuses. J’ai également commencé à m’intéresser aux étoiles en fuite et à les modéliser, c’est-à-dire des étoiles qui se déplacent plus vite que la vitesse du son par rapport à leur environnement et qui produisent donc une onde de choc (un arc de choc) lorsqu’elles se déplacent dans la galaxie. Après mon post-doctorat, j’ai eu la chance de pouvoir travailler à l’Observatoire astronomique sud-africain, à un moment particulièrement excitant avec la montée en puissance du SALT (Southern African Large Telescope) et l’annonce du Square Kilometre Array à l’horizon. J’étais enthousiaste à l’idée de faire partie de la communauté astronomique grandissante du continent et j’ai eu l’occasion de partager cet enthousiasme en occupant un poste de vulgarisation et de recherche. C’était merveilleux de travailler avec l’équipe de vulgarisation du SCBP – amener l’astronomie vers les gens ! Quelques années plus tard, j’ai obtenu un poste conjoint à l’Observatoire et à l’Université du Cap et j’ai eu l’occasion d’enseigner et de partager mes recherches avec les étudiants. Maintenant, je dois chercher des réponses avec de nombreux collaborateurs en Afrique du Sud et dans le monde entier. Pour être honnête, nous finissons par trouver de plus en plus de bonnes questions !

Avez-vous ressenti des difficultés durant votre parcours?

Certainement ! Ce n’est pas toujours facile – il m’arrive souvent de rester bloquée sur un problème, par exemple lorsque mon code ne s’exécute pas ou qu’un bogue produit un comportement déroutant, mais il faut persévérer et c’est incroyablement satisfaisant de résoudre le problème. J’ai également eu la chance d’avoir des superviseurs très coopératifs et des modèles d’inspiration qui m’ont toujours encouragé à me dépasser et à continuer. J’ai également eu la chance d’avoir une famille et un mari très compréhensifs, qui m’ont accompagnés d’un pays à l’autre et se sont occupés de moi et de tout le reste lorsque j’avais des échéances ou des événements importants.

Quel(s) conseil(s) donneriez-vous aux jeunes filles de votre pays qui souhaitent étudier l’astrophysique?

Je vous dirais de foncer… suivez votre rêve, il vous mènera certainement loin ! Si vous avez accès à l’internet, il y a maintenant beaucoup d’informations sur les différents programmes, les bourses, les universités, etc. Essayez de les contacter pour leur demander des conseils directs. En attendant, travaillez dur à l’école – assurez-vous de vous appliquer, d’obtenir de bons résultats en sciences afin d’être prête et de pouvoir profiter de l’occasion qui se présentera. Parlez à vos professeurs et à d’autres professionnels – il est utile de trouver des mentors qui peuvent vous aider dans votre parcours. Ce ne sera pas facile, vous devrez donc croire en vous et persévérer. Les gens pensent souvent que la science est réservée aux « génies », mais ce n’est pas le cas. La plupart des avancées scientifiques sont le fait de personnes ordinaires qui travaillent dur et persévèrent. Depuis des milliers d’années, nous regardons le ciel nocturne et essayons de comprendre la place que nous y occupons. Nous savons, grâce à l’astronomie indigène, que nos ancêtres faisaient cela et utilisaient les étoiles dans leur vie quotidienne… l’astronomie fait partie de notre patrimoine scientifique, elle est dans notre ADN !

Pensez-vous qu’il y a des aspects/défis spécifiques qui concernent les femmes africaines en astrophysique?

Il y a de grands défis à relever. La première chose dont nous avons besoin est de nous assurer que les communautés sont conscientes des possibilités de faire carrière en astronomie. Ma famille et mes professeurs, par exemple, ne savaient même pas que c’était une option. Le fait d’avoir des modèles de femmes africaines visibles aurait certainement contribué à les convaincre plus facilement que ce n’était pas seulement une possibilité, mais aussi la bonne voie. L’accès à l’information et aux ressources est incroyablement important, mais il est en général encore très limité sur le continent. Les possibilités de poursuivre des études, les financements et les bourses d’études font cruellement défaut pour aider à soutenir les personnes qui se destinent à une carrière en astrophysique. D’autres obstacles doivent également être surmontés : les pressions sociétales, les stéréotypes, la discrimination, le racisme, le sexisme, les inégalités structurelles et les problèmes familiaux, tels que le manque de services de garde d’enfants, de congés parentaux et de soutien, font qu’il est plus difficile pour les femmes de poursuivre leur carrière et de fonder une famille. Ces choses commencent à changer, mais il reste encore beaucoup à faire !

Quels sont vos actions/projets en cours concernant l’astronomie?

C’est une période incroyablement excitante – la puissance de calcul toujours plus grande signifie que nous pouvons maintenant faire des modèles de plus en plus détaillés et précis des étoiles en fin de vie, et des étoiles géantes dans les binaires qui m’intéressent, et avec beaucoup de nouveaux télescopes puissants et même des observatoires multi-messagers en construction et certains déjà en ligne, nous aurons des données exquises sur ces étoiles pour comparer et contraindre les modèles. Cela signifie non seulement beaucoup plus de réponses, mais aussi beaucoup, beaucoup plus de questions intéressantes et intrigantes ! C’est aussi une période particulièrement excitante pour l’astronomie sur le continent. Notre communauté se développe rapidement, et je fais partie du sous-comité scientifique de la Société africaine d’astronomie (AfAS) qui s’efforce de faire en sorte que cela continue. Nous disposons déjà du SALT, l’un des plus grands télescopes optiques du monde, de MeerKAT, précurseur du plus grand radiotélescope du monde, ainsi que d’une multitude d’autres télescopes et installations en cours de développement sur le continent. Par l’intermédiaire de notre groupe, Astronomy in Colour (aic.saao.ac.za), nous nous efforçons également de trouver des solutions à bon nombre des défis auxquels les femmes africaines sont confrontées, mentionnés ci-dessus, afin de faire en sorte que l’astronomie soit un lieu où chacun peut s’épanouir. Je suis également très heureuse de faire partie de l’équipe qui travaille à la planification de l’Assemblée générale de l’Union Astronomique Internationale qui se tiendra au Cap en 2024 – la première fois que cette « coupe du monde » d’astronomie se déroulera sur le continent.

Etoiles africaines: Mayssa El Yazidi

Etoiles africaines: Mayssa El Yazidi

Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?

Je m’appelle Mayssa El Yazidi, je suis étudiante en doctorat au Centre d’études et d’activités spatiales « G. Colombo »- CISAS, à l’Université de Padoue. Je suis originaire de Tunisie, mais actuellement, j’étudie en Italie.

Mayssa El Yazidi

Quel a été votre parcours pour devenir astronome?

J’ai étudié la géologie à la Faculté des Sciences de Tunis, Université Tunis El Manar II, car en Tunisie nous n’avons pas de filière universitaire dédiée à l’astronomie ou à l’astrophysique. En 2014, j’ai eu mon diplôme de licence (licence fondamentale) et mon projet de recherche portait sur  » La géologie comparée des corps célestes du système solaire « . Par la suite, j’ai commencé mon master et en 2016, j’ai été diplômée et mon mémoire de master portait sur « La géologie de Mars ». En 2018, j’ai eu une bourse au Centre d’études et d’activités spatiales « G. Colombo »- CISAS, pour cartographier les grabens de Noctis Labirinthus sur Mars, et fin 2018, j’ai reçu une bourse de doctorat en sciences, technologies et mesures spatiales (CISAS), pour l’étude de la géologie de surface de Mars et Mercure.

Mon intérêt se concentre sur la composition et les processus responsables des modifications de la surface planétaire et des terrains analogues en utilisant différents jeux de données, les MNT, et la géo-modélisation 3D.

Qu’est ce qui vous a amené à étudier l’astronomie?

Depuis mon enfance, j’ai toujours été fascinée par l’astronomie, l’astrophysique et les sciences planétaires… J’étais toujours curieuse d’en savoir plus sur l’univers, les planètes qui sont relativement proches de nous, la possibilité de vie en dehors de la planète Terre et si l’humain est capable de vivre sur une autre planète.

En 2011, lorsque j’ai commencé à étudier à l’université, ma professeure Slim Shimi Najet, était celle qui donnait un cours d’introduction bref sur les planètes et le système solaire, avant de commencer le cours sur la Terre et sa géologie. A cette époque, la professeure Shimi Najet m’a encouragée et a amélioré ma curiosité pour en savoir plus sur les planètes et l’univers, et avec elle, j’ai commencé ma carrière et mes recherches et elle a été ma superviseur pour mes projets de recherche de licence et de master, pendant 6 ans.

Avez-vous ressenti des difficultés durant votre parcours?

Actuellement non ! J’étudie dans l’une des meilleures universités du monde, l’université de Padoue, et j’habite dans la ville de Galilée. Je suis fière et heureuse de mon travail et de mes recherches actuelles.

Quel(s) conseil(s) donneriez-vous aux jeunes filles de votre pays qui souhaitent étudier l’astrophysique?

NE RENONCEZ JAMAIS ! NE PERDEZ JAMAIS ESPOIR !

Ce ne sera pas un chemin facile. J’ai postulé pour plus de 400 postes (maîtrise, bourse de doctorat, bourse de recherche…) dans le monde entier jusqu’à ce que finalement, j’en obtienne un.

Croyez en vous ! Croyez en votre rêve et battez-vous pour l’obtenir.

Si vous avez quitté l’astrophysique, quel a été l’apport de vos études dans ce domaine pour votre carrière/vie?

J’aurai une formation scientifique, la capacité d’écrire des articles et des documents scientifiques, j’en saurai plus sur l’univers et les planètes, je pourrai faire des activités de vulgarisation et montrer au public (étudiants, enfants, adultes, astronomes amateurs), à l’aide d’un télescope, les planètes, la lune, les galaxies…..

Je serai en mesure d’aider aux activités éducatives puisque l’astrophysique est principalement basée sur la physique et les mathématiques, donc je pourrai soutenir et aider aux projets académiques et avoir une carrière scientifique.

Pensez-vous qu’il y a des aspects/défis spécifiques qui concernent les femmes africaines en astrophysique?

Je pense que le défi le plus difficile à relever est que dans votre pays, il n’y a pas d’universités, de facultés ou d’instituts pour enseigner l’astronomie ou l’astrophysique, et donc vous allez vous retrouver obligée d’émigrer dans un autre pays pour étudier ce dont vous rêviez.

Nous espérons donc voir un jour tous les pays d’Afrique enseigner l’astronomie, l’astrophysique, les sciences planétaires et l’aérospatiale ! Ce sera le plus beau rêve du monde !

En outre, d’après mon expérience personnelle, je trouve qu’il n’y a pas assez de bourses d’études destinées aux femmes pour les encourager et les aider à étudier l’astronomie.

Quels sont vos actions/projets en cours concernant l’astronomie?

Actuellement, je travaille en tant que coordinatrice nationale de la vulgarisation en astronomie pour la Tunisie au bureau de la vulgarisation en astronomie de l’union astronomique internationale (OAO/IAU) et je suis une associée active de la commission C2/ de cette union. Avec le comité national de la vulgarisation en Tunisie, nous encourageons les activités de diffusion des connaissances  et sensibilisons les gens à l’importance de l’astronomie et de l’astrophysique dans le développement des sciences et de l’éducation.

Nous organisons plusieurs activités (conférences en ligne, observations, concours, ateliers et séminaires) en plus de l’AstroCamping et des formations en astronomie et en astrophotographie en collaboration avec différentes associations et clubs d’astronomie tunisiens.

Instagram
YouTube
YouTube
Follow by Email