De nombreux amateurs ont le plaisir d’observer la galaxie M101 dans la Grande Ourse. Située à 23 millions d’années-lumière de la Terre, vue de face, elle est environ 10 fois plus massive que la nôtre, pour un disque presque 2 fois plus grand, de 170 000 années lumière (a.l.). Malgré sa masse plus élevée, M101 présente de nombreuses similitudes de forme, de populations d’étoiles et d’amas globulaires avec notre galaxie, la Voie lactée. Cependant, le modèle cosmologique standard, où les grandes galaxies sont construites par accrétion de galaxies naines, prévoient que les bulbes et les bras spiraux des galaxies géantes comme M101 soient entourées d’un halo riche en étoiles.
Toutes les observations des grandes galaxies ne confirment pas cette prédiction. Six astronomes ont exploité des images du télescope spatial Hubble pour observer la répartition des étoiles de M101. À des distances comprises entre 120 000 et 190 000 a.l., les observations révèlent une population semblable à celle des amas globulaire de faible métallicité (pauvres en éléments atomiques lourds). Et puis au-delà, dans le halo, la densité d’étoiles chute terriblement. Ils estiment que le halo contiendrait 0,2 % de la masse totale des étoiles dans la galaxie. C’est très peu en comparaison des modèles de grandes galaxies, et aussi en comparaison de plusieurs galaxies observées auparavant. Les auteurs en déduisent que M101 possède un halo « anémique ». Cependant, M101 n’est pas la seule dans ce cas. Une galaxie que nous connaissons bien l’est aussi : la nôtre ! Mais il est étonnant qu’une galaxie grande comme M101 partage cette caractéristique avec la nôtre, qui est plus petite. Les simulations numériques des cosmologistes montrent que dans le scénario où les grandes galaxies grandissent par accrétion de galaxies naines, les halos ont principalement été alimentés en étoiles par les plus grandes d’entre-elles. Le halo peu dense et de faible métallicité de M101 montreraient alors que cette galaxie est parmi celles de l’Univers local ayant eu l’histoire la plus tranquille.
Fabrice Mottez, Société Astronomique de France