Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?
Je m’appelle Sambatriniaina Rajohnson. Je suis originaire de Madagascar et en ce moment je suis en deuxième année de Doctorat à l’Université du Cap, en Afrique du Sud.
Quel a été votre parcours pour devenir astronome?
Après l’obtention de mon baccalauréat scientifique (série C) en 2012, j’ai décidé de poursuivre mes études universitaires en Physique à l’Université d’Antananarivo, où j’ai obtenu mon diplôme de Licence en 2015. Arrivée en 4ème année, on devait tous choisir une branche de la Physique afin de se spécialiser. Pour ma part, j’ai entendu dire qu’un nouveau cursus venait tout juste d’être implémenté à l’Université: c’était l’Astrophysique. Sans hésiter, j’ai tout de suite choisi de joindre ce parcours et je vous expliquerai mes raisons plus bas. Puis, en 2018, tout en préparant ma thèse de Master, j’ai participé au programme « Development in Africa with Radio Astronomy » (DARA). Il s’agissait d’une formation technique en Radio Astronomie pour former les étudiants originaires des huit pays africains faisant partie de l’African VLBI Network, un réseau de radiotélescopes en Afrique. Je pense que c’est surtout cette formation qui m’a inspirée et dirigée dans le choix de mes futurs parcours professionnels. Elle m’a également permis de trouver un superviseur afin de poursuivre mes études de Doctorat à l’Université du Cap.
Qu’est ce qui vous a amené à étudier l’astronomie?
J’ai toujours aimé les matières scientifiques, surtout la physique quand j’étais plus jeune. Avec une imagination débordante, j’adore la science-fiction et les documentaires sur l’astronomie. Je me posais tout le temps des questions sur les origines de notre Univers, sommes-nous vraiment seuls? Le ciel, les étoiles et ses mystères m’ont en même temps toujours fascinés et intrigués. Cependant, je pensais que ce n’était juste que des rêves et qu’il fallait un jour poser mes pieds sur Terre car à cette époque-là, je ne pensais pas que devenir astronome serait possible. Mais dès que j’ai su que le parcours astronomie existait à Madagascar, je savais que mon rêve allait se réaliser. C’est pourquoi je me suis directement inscrite. Je savais que ce ne serait pas du tout facile, mais c’était un défi à relever.
Avez-vous ressenti des difficultés durant votre parcours?
Oui, en effet j’ai éprouvé quelques difficultés notamment sur le plan financier et matériel, mais cela ne m’a pas empêché d’avancer dans mon travail. Par exemple, ne pas avoir accès à une connexion internet ni pouvoir accéder aux articles et revues payants étaient parfois problématiques dans l’accomplissement de mes travaux de recherches.
Quel(s) conseil(s) donneriez-vous aux jeunes filles de votre pays qui souhaitent étudier l’astrophysique?
Je pense que ces conseils seront valables pour n’importe quels domaines du STEM (Science, Technologie, Ingénierie et Mathématiques). Osez et soyez déterminées à accomplir vos rêves jusqu’au bout car il n’y a pas de rêves trop grands. Si vous aimez les matières scientifiques, la programmation, et que vous ayez un esprit critique sur notre Univers, n’hésitez pas, l’astronomie est faite pour vous et vous avez le potentiel !
Si vous avez quitté l’astrophysique, quel a été l’apport de vos études dans ce domaine pour votre carrière/vie?
L’astronomie se base sur l’analyse des données sur les phénomènes célestes. Les différentes techniques de diagnostic que j’ai utilisées dans mes projets peuvent tout à fait être réutilisées dans n’importe quel domaine de recherches, ou même dans le secteur industriel. Donc si un jour, je devais quitter l’astrophysique, tout ce que j’aurai appris n’aurait pas été en vain. Je pourrai utiliser mes compétences en programmation informatique, en communication et rédaction. Être astronome ne se résume pas à ne faire que des recherches, c’est aussi partager nos passions et nos découvertes avec le public.
Pensez-vous qu’il y a des aspects/défis spécifiques qui concernent les femmes africaines en astrophysique?
La lutte contre les disparités sociales et culturelles fait encore bel et bien partie des défis pour l’épanouissement des femmes africaines. Beaucoup pensent encore que les domaines scientifiques tels que le STEM ne sont pas faits pour les femmes. D’ailleurs, nombreuses sont les filles qui n’ont pas le choix d’abandonner leurs études. Cependant, ces situations sont en train de changer lentement mais sûrement grâce au fait que de plus en plus de femmes modèles donnent l’exemple aux nouvelles générations.
Quels sont vos actions/projets en cours concernant l’astronomie?
Actuellement, mon projet de doctorat consiste à étudier l’évolution des galaxies en observant ses émissions d’hydrogène neutre. Plus précisément, il s’agit de cartographier et de découvrir les galaxies se situant derrière le plan galactique de la Voie lactée, vers la constellation de Vela, afin de connaître les structures à grande échelle de l’Univers. Ces observations sont difficiles à obtenir en raison de l’intense densité stellaire et la présence de poussières dans le plan galactique, rendant ces galaxies uniquement visibles qu’aux longueurs d’onde radios et infrarouges. Cependant, ces découvertes nous aideront à identifier de nouvelles structures et leurs implications dans l’évolution de l’Univers.