LE MAGAZINE DES SCIENCES DE L’UNIVERS EN AFRIQUE

Les projets pour couvrir notre ciel de satellites pour l’internet se poursuivent. Cependant, la société One Web, qui n’a pas réussi à boucler son budget (notamment auprès de son principal actionnaire, Softbank), s’est placée le 27 mars sous la protection du chapitre 11 de la loi américaine sur les faillites. En revanche, la société Starlink poursuit ses lancements par paquets de 60 satellites, environ une fois par mois (7 et 29 janvier, 17 février, 18 mars, 22 avril, début juin…).

Des flashs de satellites Starlink lancés le 29 janvier 2020, compris entre les magnitudes 2 et -2, observés à l’aube du 14 mai 2020, 3 mois et demie après leur lancement. Crédit : Nicolas Biver.

 Les astronomes continuent de se mobiliser. Des représentants de Starlink se sont rendus le 27 avril à la conférence Astro2020 pour discuter avec eux. Elon Musk y a présenté quelques solutions, fondées sur l’orientation des panneaux solaires, et sur la pose de pare-Soleil en mousse.

Indépendamment, plusieurs articles de modélisation des  effets visuels des satellites ont été publiés dans des journaux de recherche. Deux chercheurs de l’Observatoire Austral Européen (ESO) ont modélisé les conséquences pour l’astronomie optique, en considérant les satellites positionnés à leur orbite de travail (donc pas le dernier paquet de 60 en transit). Il y aura, en cas de succès de l’opération, 1100 satellites visibles à chaque endroit du ciel au crépuscule astronomique. La majorité (85 %) sera à moins de 30 degrés d’élévation sur l’horizon, mais 110 d’entre eux seront plus brillants que la magnitude 5. Pour la plupart des télescopes professionnels, 1 % à 3 % des observations seront rendues inexploitables par le passage d’un satellite ; plus grave, pour les télescopes à grand champ, comme le très ambitieux télescope Vera Rubin, 30 % à 40 % des images prises en début et en fin de nuit (une période très importante pour la surveillance des astéroïdes géocroiseurs) seront inutilisables.

Elon Musk, fondateur de SpaceX, est coutumier de déclarations inattendues ou fantasques sur Twitter, à propos de sa vie privée ou de ses projets. Cependant, la communication est sobre de la part de Gwyne E. Shotwell, la présidente et directrice exécutive de SpaceX, et les projets de la compagnie semblent avancer à bon train. Même si l’on ne peut en prévoir les résultats, SpaceX montre une bonne volonté à l’égard des astronomes. En sera-t-il ainsi avec les projets en gestation des autres compagnies ? La pollution visuelle et celle des mesures scientifiques, qui ne sont actuellement régies par aucun accord international, seront-elles systématiquement prises en compte dans le futur ? Les flottes géantes de satellites font émerger une problématique environnementale de plus, où il faut équilibrer progrès et protection de l’environnement.

Fabrice Mottez, Société Astronomique de France

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